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pathie par quoi des êtres, dans le temps aussi bien que dans l’espace, se reconnaissent, tendent à s’associer et à se combiner..., le fait d’être de même race, de même famille ». Mais« si ce fait brut, l’affinité, est humanisé et cultivé systématiquement, si la notion que nous en prenons est mêlée de tendresse et de respect », le mot d’amitié le définira plus justement. Par exemple, « entre un jeune Lorrain conscient et sa vallée de la Moselle, il y a autre chose qu’une affinité, il y a une amitié ». On cultivera donc chez le petit Philippe les amitiés qui doivent l’unir à son pays et à sa race historique, c’est à-dire les amitiés lorraines et françaises, qui, d’ailleurs, dans l’histoire, ne sont pas toujours tombées d’accord.

Dans cette éducation, M. Barrès se défend de laisser aucune part à la raison, à la persuasion dialectique. Il ne veut user que de commotions nerveuses, d’excitations sensibles. On pourrait, objecter, en passant, que ce n’est pas là une conception spécialement française, et que Montaigne, les Cartésiens, Port-Royal, Rousseau, ont conçu la pédagogie d’un point de vue tout opposé. Mais M. Barrès est, du moins, fort cohérent avec soi-même, car son but n’est pas d’introduire rien de nouveau dans l’esprit du petit garçon qu’il élève, mais seulement d’éveiller en lui l'âme lorraine, l’âme française qu’a formée la longue série de ses aïeux. Le service qu’il rend au petit Philippe, c’est de « lui donner les mots pour les vérités qu’il a dans le sang, les mots pour dégager cette conception de