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sueur de sang

siège, destiné à durer de si longs mois, était alors dans l’effervescence de son début. La Ville, courroucée de savoir qu’on avait entrepris de la violer, ébranlait dans son agitation ses propres murs et faisait aux alentours gronder ses molosses.

La vie intellectuelle s’éteignait aux approches noires de la Commune et Barbey d’Aurevilly que vingt ans plus tard, un saltimbanque désopilateur s’obstinerait à placarder ridiculement du titre de Connétable, s’acheminait avec lenteur et mélancolie, à travers Paris en désarroi, de la rue Rousselet jusqu’aux Batignolles, où l’attendait un simple dîner.

Car le Vésuve allemand n’ayant pas encore dévoré la verte banlieue, la coutume des dîners subsistait toujours, et les plus avisés ne prévoyaient pas les jeûnes et les abstinences piaculaires de l’interminable siège.

On a beaucoup parlé des toilettes de Barbey d’Aurevilly. L’excellente blague parisienne s’est fort exercée sur sa redingote et ses pantalons. D’abondantes chroniques ont raconté ses manchettes, ses cravates, ses chapeaux, sa limousine doublée de velours noir, et les contemporains, suffoqués de l’incontestable supériorité de son génie, ne lui pardonnèrent ni la peau ni la couture des gants perpétuels dont il préservait ses Mains des mains moites ou des abatis graisseux qui avaient cours parmi les littérateurs.

Au fond, pourtant, cette extravagance pré-