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sueur de sang

l’atmosphère les contraignit à se replier jusqu’au camp, où ils formèrent instinctivement un segment de cercle dont l’autel était le centre géométrique.

Le prêtre continuait sa messe avec la tranquillité des saints. On sait qu’à partir d’un certain moment, l’officiant ne peut plus s’interrompre sous quelque prétexte que ce soit. Théologiquement, il n’existe pas de force majeure, — fût-ce du côté de Dieu ! — qui le puisse relever de la nécessité infinie de consommer l’Acte indicible.

Les pauvres enfants le savaient et ils résolurent, sans phrases, de se faire tuer, non pour la France, non pour le Roi, non pas même pour les Anges et les Saints des cieux, mais uniquement et très simplement pour que cette messe pût s’achever.

Il arriva donc une chose effrayante et belle. Ils se firent, en effet, massacrer tous à la place même et dans le temps qu’il fallait pour que les malpropres hérétiques n’eussent pas le pouvoir d’interrompre le Sacrifice Essentiel.

Cette tuerie, d’ailleurs, ne fut pas donnée. Les Prussiens durent la payer cher, car les adolescents se battirent comme s’ils avaient été quelque chose de plus que des hommes, et on raconte que l’épouvantable duc de Mecklembourg, qui faisait assiéger les femmes à coups de canon, eut un