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crimes, par le plus sale peuple de la terre, par une nation de mangeaille et de pot de chambre, et les six cent mille goujats de ses armées ayant souillé nos belles campagnes du torrent de leurs excréments, il était inévitable que la noble langue du Jardin des grands Lys d’or, s’enlisât elle-même dans ce terrible fumier !

J’ai su l’histoire d’un pauvre homme capturé par les dragons de Rheinbaben et qui, fou de la honte et du désespoir de n’avoir pu se faire tuer, crachait aux Allemands le Mot unique et le recrachait sans cesse, en même temps que son écume, avec une si furieuse volonté de réprobation et d’outrage qu’on lui fit la grâce de le fusiller.

Or, c’était un professeur de rhétorique et même, je crois, un petit poète !

Évidemment, ce malheureux qui se fichait bien de sa propre vie, s’était efforcé de traduire, de condenser en une sorte d’allemand les sublimes choses qui crevaient son âme et, ne trouvant absolument que cette ordure, en avait fait un ciboire…

Le Mot fut tellement dit pendant la guerre qu’hommes et choses en demeurèrent saturés. Enfin, le Mot est devenu littéraire ! Cela dit tout.

Je me souviens, en ce moment, d’une particularité qui n’a l’air de rien et qui ne parut, en effet, que l’occasion sans cesse renouvelée de nous dé-