Page:Bloy - Sueur de sang.djvu/286

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Vous voyez, je chasse les Prussiens, comme vous.

— Tiens ! tu es franc-tireur ?

— Oui, monsieur, depuis un mois.

— Très bien ! À quelle compagnie appartiens-tu ?

— À la vôtre, si vous voulez me recevoir.

— Mais, commandant, avait dit alors un officier attentif à l’interrogatoire, ne voyez-vous pas que cet individu est une femme ?

Il avait fallu s’expliquer, et voici ce que le vieux commandant avait appris en particulier.

La jeune fille, sur le point de se marier, habitait déjà la maison de son fiancé, lorsqu’un jour les Prussiens arrivèrent inopinément. L’un d’eux, un lieutenant de hussards, sans doute excité par la chevauchée du matin, et la trouvant seule, avait tout de suite essayé de la violer.

Par malchance, il avait affaire à une fille des plus vigoureuses, et la lutte ignoble eût probablement fini par la déconfiture de l’agresseur. L’apparition de Jacques, accourant aux cris, décida le Prussien à se retirer à reculons, les yeux hors de la tête et protégé par la pointe de son sabre.

L’infortuné protecteur, sachant très bien qu’une violence directe attirerait immédiatement la foudre sur son amie et sur le village entier, parvint à se contenir toute la journée. Mais, le lendemain matin, on retrouvait, dans un endroit écarté, le corps du lieutenant criblé de coups de poignard.