On a dit puérilement qu’ils étaient partout de connivence avec les Prussiens. Il faudrait alors supposer une espèce de satanisme formellement interdit à des âmes si peu profondes.
La vérité simple, c’est qu’ils partageaient équitablement leur exécration entre les Prussiens et les Français. Les uns et les autres étaient, à leurs yeux, des gens incommodes, gâcheurs de paille et brûleurs de bois, sans parler du reste. Pour mieux dire, des propres-à-rien et des bandits, malheureusement trop armés.
La guerre ne les regardait pas. Ils ne l’avaient jamais demandée, et qu’on s’appelât Allemagne ou France, pourvu que se vendissent leurs moissons ou leurs bestiaux, qu’est-ce que cela pouvait bien leur faire ?
Étant donc forcés de choisir le moindre mal, ils aimaient mieux livrer, en gémissant, à l’ennemi ce qu’il leur était impossible de cacher. De ce côté là, du moins, il y avait des chances qu’une si bonne volonté fût payée de quelques égards et presque tous désirèrent impatiemment l’arrivée des troupes allemandes, pour en être protégés.
Quelquefois, il est vrai, cette monstrueuse protection leur parut ensuite plus amère que les ruines et les agonies. Question de chance. Cela dépendait des corps et des chefs de corps. On tombait bien ou on tombait mal. Mais on peut assurer qu’il n’y avait pas de trahison dont les paysans ne fussent aussitôt capables sous la me-