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L’Allemand disait, comme eût pu le dire son illustre correspondant le Chancelier, « qu’on a le droit d’être cruel quand il s’agit de politique, que la véritable stratégie consiste à frapper vigoureusement l’ennemi, mais surtout à faire aux habitants le plus de mal possible pour les engager à se dégoûter de la lutte et à exercer une pression sur le gouvernement. Il ne faut laisser aux gens, ajoutait-il d’un ton péremptoire, que les yeux pour pleurer la guerre et regretter leur résistance ».

Il jugeait détestable et outrageant pour l’Allemagne que les paysans prissent la fuite, et il répétait sans cesse à Messieurs les officiers qui n’avaient pourtant pas besoin d’encouragements, ces paroles qu’il disait tenir de la bouche même de Bismarck :

— Si j’étais militaire, je considérerais les biens des fuyards comme abandonnés, et je les traiterais comme tels. Et si les fuyards eux-mêmes tombaient entre mes mains, je leur prendrais leurs vaches et tout ce qu’ils auraient avec eux, en les accusant de l’avoir volé et caché. Je les ferais donc fusiller sur-le-champ.

Le Prêtre avait des sentiments plus curieux et plus rares. Il ne supportait pas que les Français se prétendissent catholiques. Cette idée le faisait rugir.

De toute son âme, il aurait voulu que la France entière tombât dans quelque hérésie inconnue, à ce point épouvantable que le devoir de détruire et d’effacer à jamais une nation si dangereuse s’imposât nécessairement à tous les peuples.