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aussi précieuses que les plus rares trésors. Il fallait nécessairement ou retourner en arrière, ce qui n’entrait dans la pensée d’aucun de ces braves, ou prendre l’offensive avec impétuosité. Quelques-uns y laisseraient très certainement leur carcasse, mais au fond, cela leur allait mieux que d’éventrer des gens endormis.

Sur un commandement de l’officier, toute la bande s’élança donc, baïonnette au vent, dans la direction présumée du gîte prussien.

Ici, je l’avoue, l’horreur est assez copieuse. Les quarante Allemands signalés pouvaient être environ cinq ou six cents. Une fois de plus on avait donné dans le piège vulgaire du faux patriote espion que les bons Germains employèrent si souvent avec succès.

Quelques minutes après, les soixante volontaires enveloppés de toutes parts, hébétés par la surprise d’apercevoir autour d’eux un si grand nombre de soldats et ne recevant aucun ordre de tirer sur des ennemis qui ne tiraient pas eux-mêmes, virent arriver un officier supérieur accompagné d’un porte-flambeau qui s’adressa tout de suite au lieutenant.

— Monsieur, vous êtes un contre dix, l’honneur est sauf et vous pouvez vous rendre sans honte. Pourquoi condamner à mort de si braves gens ?