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sueur de sang

survint la catastrophe qui le fit déchoir. Un charretier qui avait perdu ou croyait avoir perdu son argent, l’accusa. Son innocence fut prouvée. Mais l’accusateur qui avait retrouvé ses écus, eut beau retirer sa plainte, Mouche-à-Caca ne put vaincre les défiances que sa prévention de quinze jours avait allumées. Il trouva sa place prise et s’en alla, comblé de tristesse et revêtu d’ignominie, vers la belle forêt prochaine où quelques sages lui conseillèrent de ramasser le crottin des êtres qu’il avait aimés.

Il n’y avait pas à dire, elle était un peu chaude pour le fugitif, sa belle forêt pleine de Prussiens. Mais l’ayant habitée cinq ou six ans, il en connaissait admirablement les ressources et parvint à s’y cacher comme une belette en se nourrissant d’on ne sait quoi.

Le 28 novembre, une semaine après l’extermination de l’homme à barbe, il se trouvait à la pointe extrême des bois, du côté de Saint-Michel et de Batilly, Beaune-la-Rolande étant à sa droite et Pithiviers à sa gauche.

Il pouvait être huit heures du matin, lorsqu’un bruit grandiose éclata. C’était la bataille, à la distance d’une lieue à peine, sous un voile immense de fumée. Une artillerie puissante aboyait à la mort d’un peuple. La voix grondante des canons