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le dernier poète catholique

a pas à dire, celui-ci a tout quitté, jusqu’à son nom, qui serait le nom d’un grand de ce monde, s’il avait voulu, poursuivre Jésus au milieu des misérables, pour le chercher plutôt… Et comme il n’est permis à aucun homme de chercher en vain l’Homme-Dieu, voilà justement qu’il le rencontre, après minuit, au coin d’une rue : « Ah ! Généreux !… ah ! Bien-Aimé !… » Quel soliloque de ce Pauvre mourant de fatigue et d’inanition à la silencieuse Face du Christ !


Et Jésus-Christ s’en est allé
Sans un mot qui put m’consoler.
Avec eun’ gueul’ si retournée
Et des mirett’s si désolées
Que j’ m’en souviendrai tout’ ma vie.

Et à c’ moment-là, le jour vint
Et j’ m’aperçus que l’Homm’ Divin…
C’était moi, que j’m’étais collé
D’vant l’miroilant d’un marchand d’vins !


Quelle bouleversante et prodigieuse péripétie !