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pauvre son nécessaire du superflu des consolations dont le riche est accablé.

Existe-t-il un seul prêtre qui oserait prêcher sur ce texte : « Væ vobis divitibus quia habetis consolationem vestram ! Malheur à vous, riches, qui avez votre consolation ! » ? C’est trop grave, trop évangélique, trop peu charitable. Les riches n’entendent pas que les pauvres aient des consolations ou des plaisirs. L’idée qu’un indigent aura acheté du tabac ou pris une tasse de café leur est insupportable. Ils ont raison, sans le savoir, puisque les pauvres souffrent pour eux. Mais ils gardent leur consolation à eux, leur consolation épouvantable, et quelle agonie lorsque, devant expier, par des compensations indicibles, chaque parcelle de leur homicide richesse, ils verront s’avancer sur eux cette montagne de tourments !

Consolationem vestram. Quelle désolation inverse est impliquée par ce mot ineffaçable et quel désir de l’autre côté ! Le désir d’avoir du pain, d’avoir un peu de ce bon vin qui réjouit le cœur, le désir des fleurs et de l’air des champs, de tout ce que Dieu a créé pour les