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faire fortune. D’un côté, un homme cherchant la Beauté, la Lumière, la Splendeur libératrice ; de l’autre, un esclave contraignant son âme à fouiller dans les ordures !

« On ne peut rien faire sans argent », dit un lieu commun dont la stupidité sacrilège est parfaitement ignorée de ceux qui en font usage. Sans doute on ne peut rien sans la sueur et le sang du pauvre ; mais cette sueur, quand elle coule d’un noble front, et ce sang, lorsqu’il ruisselle d’un cœur généreux, ce n’est pas aux chiens de les venir boire et c’est une horreur d’en être témoin.

Au fond, le commerce consiste à vendre très-cher ce qui a très-peu coûté, en trompant autant que possible sur la quantité et la qualité. En d’autres termes, le commerce prend la goutte du Sang du Sauveur donnée gratuitement à chaque homme et fait de cette goutte plus précieuse que les mondes, épouvantablement multipliée par des additions ou mixtures, un trafic plus ou moins rémunérateur.

— Je ne vous force pas à venir chez moi,