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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

suivant leur degré de culpabilité, les contemporains de la Découverte cherchèrent une explication à ce sinistre si épouvantable dans l’ensemble et si intelligent dans les détails. Mais en général, les préventions semées contre le révélateur du Globe empêchaient de reconnaître le caractère pourtant si expressif de ce désastre. Au lieu d’y voir un jugement de Dieu, les calomniateurs de l’Amiral répandirent le bruit que par sa puissance ténèbreuse et ses incantations infernales, ce méchant homme avait soulevé cette tempête, afin de se venger de ses ennemis. Le vulgaire fut persuadé que Colomb s’était servi d’un pouvoir surnaturel pour combiner tous ces malheurs dont il avait exempté uniquement le mauvais petit navire qui portait tout son bien.

« Une esquisse de la vie de Christophe Colomb, extraite de l’histoire de Robertson et publiée à Venise en 1778, l’établit positivement[1].

« Le pasteur allemand Campe, ajoute : « Cet événement remarquable fit sur les esprits bruts et superstitieux de ce temps-là une impression tout fait inconséquente. Au lieu d’adorer la justice avec laquelle la main du Tout-Puissant conduit les hommes, ils s’imaginèrent sottement que Colomb était un sorcier, et qu’avec le secours de puissants esprits à ses ordres, il avait excité cette tempête pour se venger de ses ennemis. Car autrement, disaient-ils, pourquoi n’y aurait-il eu d’épargné précisément que le vaisseau qui avait à bord ses propres biens[2] ? » Sans recueillir de plus nombreux témoignages, nous nous arrêterons à cette remarque :

  1. « Crederono coloro che Colombo possedesse un potere sopra naturale e s’immaginarono ch’agli (medesimo avesse combinato quel terribile temporale per arte magica e per forza d’incanti. » — Vita di Cristoforo Colombo, p. 130.
  2. Campe, Dévouverte de l’Amérique, t. I, p. 204.