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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

ges excercés sur la ville que ce lieu sembla frappé de la malédiction divine, et que le gouverneur intérimaire, le commandeur Ovando, résolut de transporter sa résidence de l’autre côté de l’Ozama, où la nouvelle cité perdit tous les avantages que lui assurait son premier établissement. Elle n’avait plus le même prospect, les mêmes ombrages, la même commodité. Elle manquait d’eau potable, celle de l’Ozama étant salée encore à plusicurs lieues de son embouchure.

« Ainsi, par la destruction sur les flots et la destruction sur la terre s’accomplit la prophétie, à courte échéance, qu’avait adressée le Serviteur de Dieu au chef de la population incrédule.

« Le caractère hautement instructif de ce terrible drame a frappé d’étonnement protestants et philosophes. Certains historiens ennemis de Colomb ont essayé de le défigurer en l’écourtant, ainsi, Lopez de Gomara, qui n’ignorait aucun détail de ce désastre, ne parle point de l’avis envoyé par Colomb à Ovando. Il se borne à dire que sur le refus du gouverneur, l’Amiral alla chercher un port où il fût en sûreté[1]. Alvarez de Colmenar, tout en parlant de la destructon de la flotte et de la ruine de Saint-Domingue, ne dit mot du charitable avertissement de Colomb[2]. Mais devant la concordance des historiographes à ce sujet, le protestantisme ne peut garder le silence. Voici ce que dit Robertson : « Ses avis salutaires furent regardés comme les songes d’un visionnaire qui avait l’arrogance de faire le prophète, en annonçant d’avance un événement hors de la portée de la prévision humaine.

« Tous les historiens, voyant dans cet événement une distinction si marquée et si juste de l’innocent d’avec le

  1. Lopez de Gomara. Histoire des Indes, liv. I, ch. xxiv.
  2. Alvarez de Colmenar, Annales d’Espagne et de Portugal, t. I, p. 452.