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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

Galicien, épais, mauvais marcheur, si défectueux dans sa mâture qu’une ronde brise le mettait en péril. D’ailleurs, à tout instant l’escadrille était obligée de diminuer de voiles pour ne pas le perdre de vue. Il y avait urgence de s’en débarrasser.

« Le 29 juin, l’escadrille, étant arrivée devant Saint-Domingue, jeta l’ancre à une lieue du port. Colomb envoya le capitaine du Galicien, Pierre de Terreros, exposer lui-même au gouverneur Ovando la nécessité de se procurer un autre navire, et le prier de lui céder une des caravelles qui allaient partir ou de lui en fournir une autre que l’Amiral payerait de ses deniers. Il devait aussi demander, de la part de son chef, licence d’entrer dans le port avec ses quatre navires, pour se mettre à l’abri d’une violente tempête qu’il prévoyait devoir éclater prochainement.

« Ovando aurait pu accorder la permission de descendre ; mais il craignait de déplaire au roi Ferdinand, et surtout de s’aliéner les bureaux de la marine, s’il accédait à la demande de l’Amiral. Peut-être aussi n’était-il pas convaincu de la néccessité de remplacer un navire mis en mer depuis deux mois à peine. Quant au besoin d’échapper à la tempête, la sérénité du ciel, la splendeur du soleil, le calme azuré des flots lui donnaient en ce moment l’air d’une plaisanterie. Non seulement il n’accorda pas à l’amiral de prendre un autre navire, mais il lui « défendit de descendre et même d’aborder ».

« Tout ce que demandait l’Amiral étant refusé, le capitaine du Galicien revint à bord de la Capitane rendre compte à son chef de l’insuccès de sa démarche. Il put, en passant au milieu de leurs amarres, compter dans le mouillage trente-quatre navires avec pavillon de partance. C’était la flotte que devait ramener Torrez, à laquelle s’étaient réunies deux caravelles achetées par un ancien notaire amateur de navigation, Rodrigo de Bastidas.