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OBSTACLES À L’INTRODUCTION DE LA CAUSE

le menaça de mille maux, s’il continuait à parler de ce déplorable grand homme. D’autres épîtres, également anonymes, moins nettes, mais plus perfides, lui indiquaient comment il pourrait, tout en rappelant le mérite de ce grand navigateur, avouer ses faiblesses humaines et insister sur le repentir par lequel il avait pu expier ses fautes[1].

À partir du moment où le panégyrique fut annoncé, l’infortuné Mgr Miglior vit subitement se transformer en un système de sordides persécutions la magnifique hospitalité épiscopale des premiers jours. Tout lui devint ennemi. Les familiers de l’Archevêché l’offensaient sans relâche par les plus révoltants procédés accompagnés d’attitudes et de regards dédaigneux ; les chanoines, les secrétaires et jusqu’aux domestiques, le toisaient d’un air insultant. Mgr Magnasco, outré du refus qu’il avait été contraint d’endurer, non content de tolérer ces outrages indignement prodigués à son hôte dans sa propre maison, les encourageait encore en affectant avec lui les airs glacés et les regards distraits de l’indifférence. Pour que la cohabitation devînt supportable, il fallut l’intervention épistolaire de Mgr l’Archevêque de Cagliari dont une lettre eut pour effet de radoucir un peu les manières étonnantes du pontife génois.

Tel est le charmant spectacle dont le clergé de Gênes édifie le monde. On se représente très bien l’effet de dignité et de parfaite décence sacerdotale qui doit en résulter aux yeux vigilants de l’incrédulité qui ne man-

  1. Ici, on croit reconnaître la main du chanoine Grassi, mentionné plus haut.