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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

ignorent que tout est rien et que rien n’est rien, excepté la GLOIRE de Dieu ! que toutes les choses humaines et angéliques furent établies à cette unique fin et que, si l’Église Romaine, notre Mère à tous, pouvait voir un jour, parmi les hommes, une si prodigieuse dilatation de l’Amour qu’elle n’eût plus rien à faire que des constatations de miracles et des canonisations, l’avidité dévorante de la Gloire de Dieu ne serait pas encore assouvie.

Infiniment au-dessus de la Législation divine, plane éternellement la Gloire essentielle du Législateur, car son Droit de Grâce est inamissible aussi bien que son glaive de Justice. Le Larron pénitent fut dévoré par la Gloire du Rédempteur crucifé et l’hagiographie catholique nous apprend que les plus désespérés pécheurs peuvent encore être sauvés s’ils en appellent de la Justice à la Gloire ! Aussi, l’Esprit du mal, qui est un fort grand théologien, sait admirablement ce qu’il fait quand il s’efforce de l’obscurcir dans nos âmes. Le culte des Saints est surtout odieux à cet ennemi, parce que les Saints sont une chair mortelle transpercée de Gloire et que, les honorer, c’est rendre à cette divine Gloire elle-même la plus parfaite des adorations. En même temps, les Saints soutiennent le monde. Dieu n’a fait la race humaine que pour qu’elle lui donnât des Saints et, quand cette race n’en aura plus à lui donner, l’univers se dissipera comme une pincée de poussière. Dans le sens théolugique le plus iranscendant et le plus réel, les Saints coopèrent ainsi à l’Œuvre créatrice des Six jours et à l’Œuvre réparatrice du Septième dont l’aurore ensanglanta le Calvaire et qui n’aura point de soir. Ils sont à la fois une oligarchie de Créateurs et une triom-