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LE RÉVÉLATEUR DU GLOBE

par les maltres de l’art, comme il fut oublié par les maîtres de la terre et comme il devait l’être si longtemps par l’injuste histoire, si maternelle à tant d’avortons fameux et qui ne résiste ordinairement aux Humbles que pour conforter les Superbes et les Dégoûtants.

Voici donc, je crois, tout ce qu’il est possible de conjecturer de la personne physique de Colomb sous le nimbe probable de sa future gloire d’apôtre et de confesseur de Jésus-Christ.

Grand par la taille, comme il convenait à ce type réalisé de l’ancienne prophétie du Porte-Christ, rouvre par la force patiente et calme, ses attitudes et sa démarche le faisaient paraître plus grand encore et presque formidable lorsque l’enthousiasme de l’amour ou l’emportement de son génie secouait ce puissant vaisseau d’élection divine, bâti pour rompre les ailes de toutes les tempêtes. « Homme noble et d’autorité, ce que son pourfil et contenance montrait fort bien », dit Oviedo[1], il avait ce que ne donne nulle éducation et nulle superbe, c’est-à-dire ce très grand air qui tire soudainement un homme du milieu de cent mille hommes, comme si la main du Seigneur — qui était avec Jean, dit l’Évangile — apparaissait tout à coup sur lui, lumineuse, éblouissante, irrésistible. Cette manière d’être, mille fois plus étonnante qu’on ne le suppose, esl le signe sensible par lequel furent toujours manifestés les rares êtres créés pour commander et c’est aussi le stigmate surnaturel de cette sorte de choix divin qui s’est toujours appelé la noblesse parmi les hommes.

Le visage de Colomb, « rostre autoritaire, rostro

  1. Histoire naturelle et générale des Indes, t. II, ch. iii ; trad. de Jean Poleur, valet de chambre de François Ier.