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LE SERVITEUR DE DIEU

d’expédition avec ce qu’ils appelaient la dignité de la couronne. Ce moyen consistait à munir secrètement du plan et des instructions de Colomb un bon pilote portugais et à l’envoyer à la découverte dans la route indiquée. Connaissance prise de la terre que cherchait cet étranger, on ne serait plus obligé de lui accorder une bien grande récompense. Le Roi eut le malheur de consentir à cette félonie.

Ici, le Surnaturel d’exception, le Surnaturel particulier à la Mission du Révélateur, fait apparition dans son histoire. Colomb fut invité à déposer sans retard ie détail de son projet avec les preuves à l’appui, en un mot, tous les moyens d’exécuter son entreprise. Aussitôt un des plus habiles capitaines de la marine portugaise fut dépêché vers l’Occident. Mais ce qu’on n’avait pu ravir à l’Homme de Dieu, c’était le don mystérieux. reçu d’en haut, pour l’accomplissement de son œuvre. Le succès était providentiellement attaché à sa personne et lui seul pouvait découvrir le Nouveau Monde. On comprit cela beaucoup plus tard.

« La personne de Colomb et sa découverte, dit le Comte Roselly de Lorgues, étaient les deux termes d’une céleste mathémathique. » Rien ne suffisait, humainement, pour la découverte. Il fallait la personne de celui qui portait, inscrite jusque dans son nom, cette vocation miraculeuse. Je sais que cela est tout à fait incompréhensible et, par conséquent, tout à fait absurde pour la plupart des hommes de ce temps d’égalité, qui, voulant ressusciter l’antiquité en haine du christianisme, n’ont réussi à substituer au polythéisme païen qu’un polythéisme ridicule de vanités exaspérées et impuissantes. Il faut être trois fois docteur pour savoir aujour-