Page:Bloy - Le Désespéré.djvu/365

Cette page a été validée par deux contributeurs.

tous de ces dames seraient certainement expulsés avec plus d’égards que ce Va-nu-pieds divin.

Cette simonie inspirait à Marchenoir une horreur sans bornes. Aussi, ne le voyait-on jamais parmi la foule des paroissiens endimanchés. Il déposait Véronique au premier rang, devant l’autel qu’elle aimait à voir en face, et allait s’installer, à l’abri de tous les yeux, dans une chapelle latérale et presque toujours solitaire, où son âme douloureuse risquait moins d’être coudoyée par les âmes d’argent ou de boue qui polluent de leurs toilettes la maison du Pauvre.

Il tâchait aussi de ne pas voir l’architecture de cette église moderne, — sous-imitation mal venue d’un art décadent, exécutée par quelque maçon dénué de pulchritude géométrique.

Toute son attention était pour cette Liturgie profonde qui a traversé les siècles, à l’encontre des apostasies du tire-ligne et des reniements du compas. La compréhension qu’il avait de cette merveille du symbolisme chrétien lui procurait un apaisement surnaturel. Son âme religieuse, aux trois quarts submergée par le diabolisme de la passion, prenait pied quelques instants sur ces formes saintes, au-delà desquelles il pressentait la gloire des pitiés divines. Il retombait, aussitôt après, dans les vagues folles de son délire. N’importe ! il avait une heure de réconciliation sublime, traversée d’éblouissements. Une hypertrophie de joie lui gonflait le cœur, jusqu’à l’éclatement de sa poitrine.

La grand’messe est une agonie d’holocauste accompagnée par des chants nuptiaux. Elle résume l’incommensurable des douleurs et l’infini des allé-