vent rendre témoignage de l’étonnante vitalité de cette dernière racine du vieux tronc monastique, que quatre révolutions et quatre républiques n’ont pu arracher du sol de la France.
Il serait puéril d’entreprendre une cent unième description de cette célèbre Cité du renoncement volontaire et de la vraie joie, aujourd’hui connue de tout ce qui lit et pense dans l’univers. D’ailleurs, Marchenoir ne visitait pas la Grande-Chartreuse en observateur, mais en malade, et, plus tard, il eût été fort embarrassé de rendre compte des heures de son séjour qui dura près d’un mois.
Simplement, il avait résolu de s’enfoncer, comme il pourrait, dans ce silence, dans cette contemplation, dans ce crépuscule d’argent de l’oraison, qui guérit les colères et qui guérit les tristesses. Il savait d’avance combien la solitude est nécessaire aux hommes qui veulent vivre, plus ou moins, de la vie divine. Dieu est le grand Solitaire qui ne parle qu’aux solitaires et qui ne fait participer à sa puissance, à sa sagesse, à sa félicité, que ceux qui participent, en quelque manière, à son éternelle solitude. Sans doute, la solitude est réalisable partout et même au milieu des meutes courantes du monde, mais quelles âmes cela suppose, et quel exil pour de telles âmes ! Or, il avait le pied dans la patrie de ces exilées : la famille chartreuse de saint Bruno, la plus parfaite de toutes les conceptions monastiques, la grande école des imitateurs de la solitude de Dieu !
Marchenoir y trouva précisément ce qu’il était venu chercher, ce qu’il avait déjà commencé à trouver en chemin : la paix et la charité.