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pourchas !… La digne personne qui vous a élevé sur ses genoux, cher monsieur, dut encourager, cela va sans dire, vos premières tentatives de musique noire ?

— Oh ! n’en croyez rien, répondit l’autre, qui ne sentait pas le repli de blague féroce. Bien au contraire, je pourrais montrer des lettres où elle me conseillait, par exemple, de rafraîchir le répertoire mélodique des premières communiantes : — Mon bien-aimé ne paraît pas encore, — Le temps de la jeunesse passe comme une fleur,C’en est donc fait adieu plaisirs volages, à moins que je ne préférasse travailler dans les romances d’amour à l’usage des ouvrières pauvres dont la vertu est en péril, et qui ont besoin des consolations de la musique.

Bohémond parut alors attendri, presque sur le point de verser des larmes.

— Ah ! que la voilà bien ! comme c’est elle ! Quel cœur ! quel cerveau ! Non contente d’avoir enrichi tous nos cabinets de lecture de La Petite Fadette, du Péché de Monsieur Antoine et de combien d’autres poèmes que les couturières ne pourront jamais assez lire, elle voulut encore susciter à notre laborieuse patrie le musicien qui convenait à cette littérature admirable ! Vous avez essayé, n’est-ce pas ?

— À contre-cœur, je l’avoue, et sans succès. Assurément, je n’avais pas le droit de mépriser les avis de Mme Sand, en qui je voyais une âme jumelle de cet adorable Chopin qui fut sa dernière tendresse, mais un autre souffle me poussait. Il me fallait le fantastique, le macabre,