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Anges, parmi lesquels il faudrait peut-être choisir… Si c’est l’enfer qu’on invoque, c’est, — à l’autre pôle, — exactement la même aventure.

Et pourtant, ils sont nos très proches, les voyageurs perpétuels de la lumineuse échelle du Patriarche, et nous sommes avertis que chacun de nous est avaricieusement gardé par l’un d’entre eux, comme un inestimable trésor, contre les saccages de l’autre abîme, — ce qui donne la plus confondante idée du genre humain.

Le plus sordide chenapan est si précieux qu’il a, pour veiller exclusivement sur sa personne, quelqu’un de semblable à Celui qui précédait le camp d’Israël dans la colonne de nuées et dans la colonne de feu, et le Séraphin qui brûla les lèvres du plus immense de tous les prophètes est peut-être le convoyeur, aussi grand que tous les mondes, chargé d’escorter la très ignoble cargaison d’une vieille âme de pédagogue ou de magistrat.

Un ange réconforte Élie dans son épouvante fameuse ; un autre accompagne dans leur fournaise les Enfants Hébreux ; un troisième ferme la gueule des lions de Daniel un quatrième enfin, qui se nomme « le Grand Prince », disputant avec le Diable, ne se trouve pas encore assez colossal pour le maudire, et l’Esprit-Saint est représenté comme le seul miroir où ces acolytes inimaginables de l’homme puissent avoir le désir de se contempler.

Qui donc sommes-nous, en réalité, pour que de tels défenseurs nous soient préposés et, surtout, qui sont-ils eux-mêmes, ces enchaînés à notre destin dont il n’est pas