Page:Bloy - La femme pauvre.djvu/132

Cette page a été validée par deux contributeurs.

chambre voisine, la maîtresse du lieu accourant à la voix du peintre qui parlementait avec la bonne.

La personne qui s’offrit alors avait été comparée quelquefois par celui-ci, avec plus d’exactitude que de respect, à un sac de pommes de terre à moitié vide. Elle en avait la tournure et, si on peut dire, la démarche.

Du premier coup, on sentait une de ces vertus fortifiées qui ne pardonnent pas. Quelques vieillards affirmaient qu’elle avait été jolie, mais imprenable, et il coulait d’elle une si abondante mélasse de pudeur qu’il fallait être Gacougnol pour en douter.

Elle ne paraissait pas avoir beaucoup plus de quarante ans, mais son visage, boucané par l’expérience et passé à l’encaustique de la dignité professionnelle, donnait à conjecturer une maturité indicible.

Cependant, elle accueillit Pélopidas de façon cordiale et même avec un certain élan de frégate qui largue ses voiles pour se précipiter au-devant du chef d’escadre. Évidemment, l’artiste était en posture de haute considération.

— Chère amie, dit-il, j’espère que vous voudrez bien me pardonner de venir si tard, quand vous saurez ce qui m’amène. Souffrez, avant tout, que je vous présente mademoiselle Clotilde Maréchal, une jeune personne à laquelle je m’intéresse très vivement et que je recommande à vos bons soins. Pouvez-vous, ce soir même, lui donner l’hospitalité ?

À la vue de Clotilde s’approchant d’un air timide, mademoiselle Séchoir prit son attitude suprême qui consistait