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venait-elle pas de le déclarer elle-même ? Il se serait arraché la tête.

Mais empoisonneuse de qui ? Bon Dieu ! Il ne connaissait personne qui fût mort empoisonné dans son entourage. Ce n’était pas son père qui avait reçu un paquet de mitraille dans le ventre. Ce n’était pas lui, non plus, qu’elle aurait essayé de tuer. Il n’avait jamais été malade, n’avait jamais eu besoin de tisane et se savait adoré. La première fois qu’il s’était attardé le soir, et ce n’était certes pas pour de propres choses, elle avait été malade elle-même d’inquiétude.

S’agissait-il d’un fait antérieur à sa naissance ? Son père l’avait épousée pour sa beauté, lorsqu’elle avait à peine vingt ans. Ce mariage avait-il été précédé de quelque aventure pouvant impliquer un crime ?

Non, cependant. Ce passé limpide lui était connu, lui avait été raconté cent fois et les témoignages étaient trop certains. Pourquoi donc cet aveu terrible ? Pourquoi surtout, oh ! pourquoi fallait-il qu’il en eût été le témoin ?

Soûl d’horreur et de désespoir, il revint à la maison.



Sa mère accourut aussitôt l’embrasser.

— Comme tu rentres tard, mon cher enfant ! et comme tu es pâle ! Serais-tu malade ?