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exégèse des lieux communs

XIII

J’ai la loi pour moi.


C’était une famille chrétienne à la manière d’autrefois. Le père, excellent ouvrier et très brave homme, apportait exactement son salaire à la maison. La mère, pleine de vaillance, faisait des ménages. L’aîné des enfants, un beau garçon de quatorze ans, venait de commencer son apprentissage et les deux petites filles, dont la moins jeune se préparait à la première communion, allaient à l’école des sœurs. C’étaient d’humbles gens d’une candeur extrême qui voulaient devenir des saints. Une tête d’épingle jetée sur leurs bonnes intentions ne serait pas tombée par terre.

On priait en commun, chaque matin et chaque soir. On allait ensemble aux offices, les dimanches et jours de fêtes et, le plus souvent possible, à une première messe dans la semaine. Bien des fois, on lisait l’histoire des Martyrs ou tel autre de ces rares livres qui donnent la vie. Quelques images pieuses, détestables et attendrissantes, pendaient aux murs : une Vierge à la Chaise écrasée sous quinze cents pierres lithographiques, un Ecce Homo du Guide mis en couleur par des vitriers barbares, un Gol-