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tan qui eut un jour l’invraisemblable toupet de se vanter, dans le plus inouï feuilleton, d’être le Minotaure de la critique et de percevoir d’exacts octrois sur les débutantes, forcées de lui passer par les mains sous peine d’insuccès fatal… Il est tellement arrivé, d’ailleurs, qu’il n’a plus rien à craindre pour sa considération personnelle, même des plus énormes démentis que de salopes nécessités peuvent le contraindre à s’infliger à lui-même tous les huit jours.

Si, par exemple, il a bavé son venin sur d’infortunés cabots dont la cabotine qu’il protège a besoin pour ne pas rater ses effets, il les proclamera, sans hésiter, comédiens illustres dans son plus prochain article. Cela lui est tout à fait égal et tout le monde est parfaitement satisfait.

Un beau spectacle, c’est Sarcey dans son fauteuil, un jour de première, avec son crâne blanchâtre et roséolé qu’on croirait atteint d’alopécie, avec ses petits yeux divergents et obombrés d’une broussaille sourcilière, avec son nez en bossage dans sa face de vieil éleveur boursouflé, avec toute sa personne gauche et massive d’éternel croquant.

Lorsque, par hasard, la pièce est bonne, on affirme qu’il s’endort toujours à partir du second acte et qu’il ronfle même. Je n’en sais rien, mais qu’il dorme ou veille, son vaste nez lui sert toujours d’attitude. Il y plonge sans relâche les énormes boudins de ses doigts et en retire d’inépuisables mucosités qu’il roule et pétrit en fines