Page:Bloy - Belluaires et porchers, 1905.djvu/247

Cette page a été validée par deux contributeurs.

À Barbey d’Aurevilly.
Kéroman-Lorient (Morbihan)[1].
Monsieur,

Je ne reçois rien de vous. Votre article n’aurait-il pas paru ? Je n’ose pas vous le demander. Il est impossible qu’il n’ait pas paru. Car je suis parti emportant votre parole d’honneur.

Ma main tremble en vous écrivant. Est-ce qu’il est possible que vous fassiez comme les autres et que vous m’abandonniez ? Faire comme les autres, cette chose hideuse et commune, ce crime bourgeois, faire comme les autres, abandonner celui que tout abandonne, oublier l’absent, oublier l’exilé, cracher sur celui qui est sans armes et sans défense, le crime des crimes, le crime par omission, celui auquel sont réservés uniquement les anathèmes du Jugement dernier : « J’avais faim et vous ne m’avez pas donné à manger, etc. » ; il m’est absolument impossible d’associer cette chose froide, vulgaire et hideuse, à votre nom que j’aime et que j’admire.

Vous, le grand critique, hardi et chevaleresque, vous qui avez faim et soif de justice, vous, le défenseur éloquent et sublime des abandonnés, vous feriez comme les autres ! vous, d’Aurevilly !

Et moi qui, après avoir écrit :

L’Athéisme au xixe siècle,

Le Style,

Angèle de Foligno,

  1. Toutes ces lettres, de 1876 à 1881, sont sans dates. L’un des signes caractéristiques d’Hello, c’est qu’il n’avait pas la notion du temps.