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l’imposture. Il y a une effroyable, mais enivrante félicité dans l’idée qu’on ment et qu’on trompe, dans la pensée qu’on se sait seul soi-même et qu’on joue à la société une comédie dont elle est la dupe et dont on se rembourse les frais de mise en scène par toutes les voluptés du mépris. »

À l’exception d’une seule, dont l’effroyable sincérité n’est qu’un luxe de vengeance et qui se traîne elle-même, en brâmant de désespoir, sur la claie choisie de son stupre éclaboussant, — la tapisserie de ces bayadères est plombaginée, fil à fil, de toutes les nuances pénombrales de l’imposture, de la cafardise de la femme et du sycophantat de sa luxure.

L’imagination peut toujours surcharger le drame ou le mélodrame, on ne dépassera pas cette qualité d’horreur.

Le belluaire de ces vampires félins partant de ceci, que « les crimes de l’extrême civilisation sont certainement plus atroces que ceux de l’extrême barbarie par le fait de leur raffinement, de la corruption qu’ils supposent et de leur degré supérieur d’intellectualité,… » fait observer que « si ces crimes parlent moins aux sens, ils parlent plus à la pensée ; et la pensée, en fin de compte, est ce qu’il y a de plus profond en nous. Il y a donc, pour le romancier, tout un genre de tragique inconnu à tirer de ces crimes, plus intellectuels que physiques, qui semblent moins des crimes à la superficialité des vieilles sociétés matérialistes, parce que le