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venue à travers la mer Atlantique, envahissait insolemment l’Europe et l’Asie. La mer Atlantique était alors navigable, et il y avait, au-devant du détroit que vous appelez les colonnes d’Hercule, une île plus grande que la Libye et l’Asie. De cette île, on pouvait parfaitement passer à d’autres îles, et de celle-là, au continent qui borde tout autour la mer intérieure ; car ce qui est en deçà du détroit dont nous parlons, ressemble à un port ayant une entrée étroite, mais il y a au delà, une véritable mer, et la terre qui l’environne est un véritable continent. Dans cette île Atlantide régnaient des rois d’une grande et merveilleuse puissance ; ils avaient sous leur domination l’île entière ainsi que plusieurs autres îles et une partie du continent. En outre ils régnaient sur quelques contrées de l’Occident.

Il me semble que tout, dans ce récit, a le caractère parfaitement légendaire, depuis l’existence d’une Athènes neuf mille ans avant notre ère, la connaissance que les Égyptiens de cette époque reculée auraient eue d’un pays situé au loin dans l’océan Atlantique, pays d’ailleurs rempli de merveilles, gouverné d’abord par les dieux, et qui aurait disparu un jour subitement. N’oublions pas, d’ailleurs, que ce n’est pas là la seule légende employée par Platon. Dans d’autres de ses traités, il a eu recours aux mêmes moyens, inventant, par exemple, l’histoire de Her l’Arménien ou celle de la Caverne, pour donner plus de vie à ses théories philosophiques. Ici d’ailleurs, il indique lui-même le but pour lequel il a créé l’Atlantide et l’Athènes préhistorique : ces deux pays ne servent qu’à la mise en pratique de ses idées sur la République parfaite.

Quant à l’autorité de Solon invoquée en faveur du récit, on ne doit, me semble-t-il, y ajouter la moindre importance. Cette autorité n’est sans doute inventée que pour donner plus de créance au récit. En admettant que le sage athénien eût parlé de l’existence d’une île semblable, même d’après le rapport