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commencement du chapitre intitulé Du droit de tMre<~ et des effets de la ~OMferotMeM et de (indépendance des nations. Ces quelques mots renferment tout le secret du développement et de la durée des peuples. Conservation et perfectionnement, tel est le double but de la véritable activité indépendance pour atteindre à ce but, tel est le droit nécessaire. La nation est un être collectif, et toutes les idées que nous nous formons de ses droits, de ses devoirs, de son action, de son but, sont tirées de notre compréhension de l’individu humain. Comme lui, elle doit s’appliquer à la conservation de son existence, au soin de ses intérêts, au développement de ses facultés. Ainsi, pour la nation comme pour l’individu, l’indépendance est la première loi de l’existence et la première condition du développement. On peuple, s’il veut améliorer ses institutions, doit pouvoir en toute liberté changer, s’il le faut, le fond de sa constitution et la forme de son gouvernement. Lui seul est juge sur ce point là, et il est juge souverain. Nul ne peut être admis à arguer contre lui que les changements qu’il apporte dans son État sont de dangereux exemples pour ses voisins. Nul ne peut davantage trouver mauvais qu’il recherche tout établissement favorable à ses progrès. Son droit J’autorise à se développer dans tous les sens, et il ne peut être arrêté que lorsqu’il touche au développement de quelque autre peuple et s’expose à le gêner dans sa légitime expansion.

Au droit d’améliorer sa condition est joint le droit de se défendre. Un peuple est maître absolu de faire chez lui tout établissement qu’il lui plaira, de développer et d’organiser ses forces, de multiplier et de perfectionner tous les moyens d’action dont il dispose, armée, marine, forteresses, en vue de pourvoir à sa sûreté. Tant qu’il ne devient pas agressif, il est libre d’agir, et tant qu’il ne se sentira pas inviolablement garanti par une législation internationale strictement observée, il a le droit de vciucr lui-même à sa défense comme ill’entend. Ce droit résuitc du droit de conservation et il est inséparable de l’idée d’indépendance. Une nation pent faire tous les traités de paix, d’amitié, de commerce et de navigation, ainsi que toutes les alliances qu’elle juge favorables à ses intérêts. Mais nne nation en voie de s’agrandir on de se fortifier par des alliances ou autrement, pou rrait causer de l’ombrage autour d’elle ; c’est pourquoi l’un des principaux publicistes modernes, Martens, a établi certaines règles de courtoisie et de bon voisinage. Suivant lui, toute nation est tenue de donner des explications satisfaisantes sur tous les préparatifs ou toutes les entreprises qu’eUe fait dans le but de son légitime agrandissement ou de sa sécurité. EUe se conduit même parfaitement, si dans de certains cas elle va au-devant des questions qui pourraient lui être adressées. Ce sont là assurément des égards qu’il est bon d’observer, à condition, bien entendu, qu’ils ne pourront jamais constituer ni un droit de supériorité on d’ingérence d’un côté, ni nn devoir de condescendance et comme une infériorité du coté opposé. Est-il bien sûr, d’ailleurs, dans la pratique que ces explications pussent constituer une garantie parfaite, et ne faut-il pas plutôt l’attendre de cette réprobation dont l’opinion publique frappe de plus en plus la conquête et qui assurera un jour à chacun la libre possession de son foyer ? L’idée dindépendance exclut celle d’inter. vention d’un peuple dans les affaires d’un autre mais quand l’ingérence e~t consentie par celui qui en profite, elle est entièrement juste et légitime. Il importe, en effet, à tontes les nations qu’aucune d’entre elles ne soit empêchée dans son développement, afin que chacune puisse donner son concours à la réalisation de tous les progrès. Cependant cette assistance ne doit pas aller plus loin qu’il ne faut pour procurer le bien que cherche le peuple en détresse. Vattel pense que ces ingérences ne peuvent s’étendre au delà des

termes clairs et précis d’un traité conclu d’avance. Elles ne doivent non plus jamais devenir une cause de profit ou d’agrandissement pour la nation auxiliaire.

Une nation, en effet, n’a pas seulement des droits, elle a aussi des devoirs, et, pour reprendre le parallèle que nous avons établi, en commençant, entre elle et l’individu, nous croyons que lorsqu’elle enfreint ses devoirs et commet des fautes ou des crimes, elle doit être soumise aux arrêts de la même justice, suivant le mode dont cette justice peut s’exercer en passant de l’individu à l’être collectif. Mais l’on doit distinguer entre les fautes commises en dehors d’elle ou dans son propre sein. Dans ce dernier cas son indépendance doit être respectée comme la conscience d’un individu ; tout au plus ses voisins auraient-ils le droit de représentations officieuses. Mais quand elle commet des actes offensifs à l’égard des autres êtres collectifs au milieu desquels elle vit, elle tombe forcément sous le coup de leur vengeance, de leur répression. Les nations sont égales entre elles, car elles ont toutes les mêmes droits et les mêmes devoirs. Grotius estime que les États, bien qu’inégaux en force, sont égaux en droits. Le baron de Wolf établit comme maxime fondamentale que les diBérentes nations sont entre elles dans l’état d’indépendance et d’égalité naturelle. G. F. de Martens dit qu’entre les nations comme entre les individus il y a une égalité parfaite de droits naturels et absolus. Qui dit égalité de droits dit en même temps égalité de devoirs.

En vertn de l’égalité, toutes les nations ont droit aux mêmes égards et au même respect, et aucun peuple ne doit être exposé à rien qui puisse blesser sa personnalité. 11 faut que l’indépendance de chacune se concilie avec l’égalé de tontes, et, réciproquement, l’indépendance de toutes avec l’égalité de chacune. Toute nation a le droit de reconnaître on de ne pas reconnjitre le gouvernement qu’une autre s’est donné, le souverain qu’elle a choisi