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MARIAGE.


qu’un argument en faveur de l’établissement de la polygamie parmi eux, de même qu’on ne doit prendre que pour une excuse de la polyandrie, usitée dans le Tibet, l’affirmation des Lamas, que c’est à cause du petit nombre de femmes comparé à celui des hommes, que la loi a permis dans leur pays à une femme d’avoir plusieurs maris.

Il est d’ailleurs une preuve manifeste que la polygamie n’est pas le résultat de circonstances propres aux climats chauds c’est qu’elle est également établie dans des climats tempérés, par exemple, chez des peuplades indigènes de l’Amérique du Nord, et même dans des climats froids, tels que le Kamehatka et les îles Aléoutiennes.

Si, laissant de coté la polyandrie, qui paraît n’avoir d’antre cause, du moins au Tibet, et elle ne semble guère pratiquée autre part, que les difneultés de la vie dans un pays pauvre, isolé et de diuicite culture, nous cherchons à nous rendre compte de la manière dont la polygamie et la monogamie sont répandues sur la terre, nous voyons qu’elles semblent se classer, non par climats, mais par races. Celte-ci se rencontre dans les diverses branches de la famille indo-européenne ; celle-là, quoique sous des formes différentes, dans toutes les autres familles (mêmes blanches) de l’espèce humaine, aussi bien dans la race jaune que chez les nègres et les peaux rouges. Chez les peupes de la race jaune, il est vrai, la loi ne reconnalt qu’une seule épouse légitime ; mais elle permet en même temps des concubines trois dans la Chine, un nombre ittimité dans le Birman ; elle sanctionne et garantit leur position, en sorte qu’elles sont de véritables épouses, mais d’un rang inférieur. On’on n’objecte pas que les Juifs, appartenant à la race sémitique, sont monogames et que la pluralité des femmes est établie chez les Indous, qui sont de la famille indo-européenne. Primitivement la polygamie était établie chez tous les Abrahamides sans exception. La monogamie ne commença à s’introduire parmi les Juifs qu’après le retour de la captivité de Babylone, ce qui s’explique d’un coté par l’influcnce mazdécnne et de l’autre par cette circonstance que les Israélites qui rentrèrent à cette époque dans leur patrie étaient de la classe pauvre et se trouvaient par cela même obligés de n’avoir qu’une femme, comme c’est encore le cas dans les familles peu fortunées chez les musulmans. Elle ne devint générale parmi eux qu’après que les lois de Justinien eurent absolument défendu la pluralité des femmes dans tout l’empire romain.

Au contraire, la monogamie fut primitivement pratiquée seule parmi les Indous t, On ne trouve pas de traces de la pluralité des femmes dans le Rig-Véda. La polygamie fut dans l’Inde la conséquence de l’établissement du brahmanisme et de la division en castes. La manière dont elle fat réglementée porte avec elle la ~t Cr~MMt m<to-<’MfO~<)H«, t. H,

preuve de son origine brahmanique. La polygamie fut en effet établie d’après cette règle que chaque homme pouvait épouser une femme de sa caste et une de chacune des castes inférieures, de sorte qu’il était permis au Brahmane d’avoir quatre femmes, au Kchathrya trois, au Vaisya deux et au Soudra une seule. Faut-il faire de la polygamie et de la monogamie une question de race ? Nous serions enclin à le croire, et cette hypothèse semble trouver sa confirmation dans ce fait bien remarquable que l’une et l’autre de ces deux

formes de mariage se trouvent constamment associées à d’autres traits distinctifs de races. La première ne se rencontre que dans des peuplades qui sont restées incapables de s’unir entre elles pour former de grands États, ou que chez des peuples qui n’ont jamais pu dépasser un degré assez bas de civilisation, auxquels il a manqué constamment le sentiment de la liberté individuelle et qui n’ont connu d’autre mode de gouvernement que le despotisme. La seconde, au contraire, ne se montre que chez des nations qui, à l’amour de l’indépendance et au sentiment de l’honneur, ont su joindre l’esprit d’ordre et d’organisation nécessaire aux grandes entreprises et qui, dominées par un insatiable désir de changement et d’amélioration, ont marché sans cesse en avant dans la voie de la civilisation. La polygamie n’est pas plus la cause des vices sociaux des uns, que la monogamie le principe des vertus sociales des autres, comme on l’a si souvent prétendu. Les faits de chacune de ces deux séries vont ensemble, marchent d’un pas égal, pour me servir d’une expression de Montesquieu. Sans doute ils agissent et réagissent les uns sur les autres et se fortifient ainsi réciproquement dans leur tendance particulière ; mais en dernière analyse, on peut, non sans quelque vraisemblance, en attribuer l’origine commune à

des aptitudes et des propriétés natives de race’. La monogamie, dont nous avons à nous occuper exclusivement, est le seul système de mariage autorisé dans tous les pays de l’Europe, sauf la Turquie, àt chez tous les peuples civilisés de l’Amérique. Mais si les législations de toutes ces nations sont d’accord sur le principe fondamental qu’il ne peut y avoir d’union qu’entre un seul homme et une seule femme, elles sont divisées sur plusieurs points de détail d’une grande importance. En théorie, les différences qu’elles présentent peuvent se ramener à deux systèmes, celui que soutient l’Église catholique et celui qui, résultat des travaux des légistes et des philosophes, a été proclamé par la révolution française, mais qui avait eu déjà des approbateurs et avait même triomphé en tout ou en partie dans certains pays protestants, principalement dans les Pays-Bas. D’après 1. La statistique est assez avancée maintenant pcar savoir qne le climat n’a pas d’influence sur la proportion des sexes. Quant à i’innuence de la race, elle n’existe qu’en ce sens que telle race est déjt pins civUisée que d’antres. Car la monogamie est nn résnltat de la civilisation. La civilisation reconnaît des droits à la femme, le sauvage la traite en être d’one espèce inférieure. M. B.