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MAJORITÉS, MINORITÉS. 359

chambres, Le sénatus-consulte du 17 juillet t856 flxait également la majorité de l’empereur à dix-huit ans. GASTON BE BOURGE. MAJORITÉS, MINORITÉS. Ces mots sont moins nouveaux qu’on ne l’a supposé ; dans tous les procès-verbaux des élections d’éveques, de doyens (quand les doyens et les évéques étaient élus), on les retrouve. Toute élection d’évêque devait être faite à l’unanimité. Quand, après plusieurs tours de scrutin, cette unanimité n’avait pas été obtenue, on déléguait le choix à des compromissaires, ou au pape. En tout cas on consignait au procès-verbal de l’élection imparfaite comment les voix s’étaient partagées, et quelle majorité, quelle minorité s’était prononcée pour tel ou tel candidat. Le pape, quand ou s’adressait à lui, se substituant au Saint-Esprit vainement invoqué, déclarait alors, de son propre mouvement, quelle avait été <s~<M~~e~te~a/’<te,~sMM/’pa/ des électeurs assemblés, et choisissait l’élu des nns ou celui des autres, sans tenir grand compte des suffrages exprimés.

Le Saint-Esprit n’étant plus prié de prendre quelque part à nos affaires que dans les occasions vraiment exceptionnelles, nous sommes moins exposés aux graves embarras que causaient autrefois ses fréquents refus de concours ; mais, privés conséquemmeut de l’assistance de son vicaire, nous avons alors notre charge de terminer entre nous presque toutes nos contestations civiles. De là cette convention, principe d’ordre public, que la majorité des suffrages fait loi.

Dans tous les pays où le système électoral est en pratique, ce principe est admis, consacré. Suivant la diversité des constitutions, les suffrages interrogés sont plus ou moins nombreux, le vote est plus ou moins universel. On remarque aussi que ces constitutions ne font pas toutes dépendre d’un vote la légitimité des pouvoirs différents qui se partagent l’exercice de l’autorité. Mais dans tous les cas où il y a recours au vote, c’est la majorité des suffrages qui décerne le mandat.

Ou, pour mieux dire, elle désigne le mandataire, car f’élti du plus grand nombre devient le mandataire de tous. L’élection faite, le scrutin enlevé, plus de majorité, ni de minorité l’élu représente non-seulement tous les électeurs qui sont venus déposer leurs suffrages, mais encore ceux qni, même par un acte d’abstention volontaire, n’ont pris aucune part au scrutin. Et ce n’est pas, qu’on le remarque, une action. Dans tous les pactes constitutionnels, il y a des fictions plus ou moins décevantes. Ceci n’en est pas une. C’est, répétons-le, une convention. Suivant le même principe, les lois votées à la majorité des suffrages dans les ~semblées électives,sont promulguées ensuite au nom de l’universalité c’est l’assemblée tout entière qui décide, décrète, ordonne On déclame contre cette simple économie de notre système éteetoral. On dit c’est le despotisme d’un chiffre, c’est la brutale souverainoté d’un nombre. J’entends l’invective maiB je cherche l’objection. Le nombre n’est pas souverain. Cette souveraineté qu’ont longtemps exercée les rois, les peuples l’ont conquise, ou reconquise, et ils prétendent en user comme d’un droit trop longtemps méconnu. Nos rhéteurs nous jurent tout émus qu’ils ne contestent pas ce droit. Qu’Us disent alors plus clairement ce qu’ils contestent, car nous ne le comprenons guère. Est-il permis d’espérer que, dans une assemblée délibérante, toute sage motion se conciliera, dès qu’elle sera produite, l’universalité des suurages ? Est-on assuré que, dans les comices étcctoraux, l’unanimité des votes ira toujours chercher ie plus digue ? Cette unanimité n’étant jamais présumable, il doit être stipulé, par convention expresse, que le vœu de la majorité l’emportera, à moins qu’on ne trouve plus raisonnable d’attribuer cet avantage au vœu de la minorité. Mais personne assurément ne le trouvera. C’est donc à la prépondérance de la majorité qu’il faut s’en tenir ; car ce serait un moyeu bien extrême que d’attribuer à la force le règlement de tous nos débats. A l’origine des sociétés on rencontre, il est vrai, cette méthode en vigueur les majorités exterminent les minorités, et, le massacre achevé, personne ne pt’otestB plus ; le consentement est unanime. Mais puisque la voix de toutes les coLgeiences civilisées proteste contre cette antique barbarie, renonçons à la vaine recherche de l’unanimité, si désirable qu’elle soit, et, dans l’intérêt bien entendu de la paix publique, fortifions l’autorité conventionnelle des majorités au lieu de travailler à l’alfaibiir.

Toute déclamation contre la prétendue souveraineté du nombre est donc frivole. Nous

accordons, toutefois, qu’on ne peut envisager sans terreur l’avénement éventuel du régime despotique, inauguré par quelque décret d’une majorité glorieuse d’un succès inespéré, et trop jalouse de l’affermir.

Cette tyrannie ne serait pas moins coupable que toute autre.

Qu’est-ce, en effet, qu’une majorité ? C’est le concours occasionnel du plus grand nombre des volontés vers une fin déterminée. Voilà un fait changeant, périssable. Clierchez-en la dénnition. Ce fait est l’acte d’une chose ; ce n’est pas une chose agissante. L’unique chose est l’individu, qui veut ou ne veut pas ce qu’on lui propose. Or, ~st-ii besoin de longtemps discourir pour faire comprendre que ce qui n’est pas ne peut rien ? Toute puissance est individuelle, puisque l’individu seul appartient à la catégorie des choses qui subsistent par elles-mêmes. Ce que nous appelons le droit des majorités, est donc un simple artifice du contrat social C’est assez dire que ce droit artificiel ne saurait prévaloir sur le droit paturel, qui n’a pas été aliéné qui n’a pu l’être, des individus réunis en société.

Ainsi le moindre élément de la minorité, l’individu lui-même, n’est pas soumis à la domination arbitraire de la majorité. Si la majorit.é gouverne, son gouvernement s’exerce en des limites précises. B lui est accédé de beaucoup