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ALGÉRIE, 194-200.

des domaines, qui procède à leur examen et prend ou provoque telles mesures qu’elle juge convenables pour la conservation des droits de l’État, si elle estime que l’origine de l’immeuble justifie ces mesures. (Ord. 1er octobre 1844, art. 32.) — Nous passons sur les formalités dont le but est d’appeler les divers intéressés au règlement de l’indemnité ; elles n’ont rien de spécial, non plus que la notification des offres (ibid., art. 33 et suiv.) ; mais le mode de règlement de l’indemnité, par le tribunal civil de première instance de la situation de l’immeuble exproprié, est propre à la législation algérienne.

194. La citation devant le tribunal doit contenir l’énonciation des offres refusées et les moyens à l’appui. — Dans la huitaine de la signification, les parties assignées ont à signifier leurs demandes et les moyens à l’appui. À l’expiration de ce délai, le tribunal peut se transporter sur les lieux ou déléguer à cet effet un ou plusieurs de ses membres. Il a la faculté de nommer d’office un ou plusieurs experts. (Ibid., art. 37 et 38.) — Le tribunal ou, le cas échéant, le juge-commissaire, parties présentes ou dûment appelées, fait sur les lieux toutes vérifications, y prend tous renseignements et entend toutes personnes qu’il croit pouvoir l’éclairer. Les experts prêtent serment et procèdent en la forme ordinaire. Les opérations terminées, la minute du procès-verbal est remise au greffe du tribunal dans les huit jours, et le tribunal délibère ensuite, en chambre du conseil, toutes affaires cessantes, sur les mémoires produits et sur les conclusions écrites du ministère public. Le jugement est prononcé en audience publique.

195. Ainsi, l’instruction est écrite ; elle exclut toute discussion d’audience ; le tribunal, saisi des documents de l’affaire, statue, en ce qui concerne la fixation de l’indemnité prise en elle-même, comme le ferait en France le jury, et sans avoir davantage à rendre compte des motifs qui l’ont déterminé. Comme le jury, il apprécie la sincérité des titres produits, et s’il acquiert la conviction que des travaux ont été faits de mauvaise foi, en vue d’obtenir une indemnité plus élevée, il a le droit de rejeter ou de réduire la valeur de ces travaux. (Ibid., art. 40 et 41.) — L’indemnité en France ne peut jamais, au cas d’expropriation partielle, se compenser absolument avec la plus-value ; celle-ci, au contraire, peut, en Algérie, être admise jusqu’à concurrence du montant total de l’indemnité, sans qu’il y ait, d’ailleurs, jamais lieu au paiement d’une soulte par l’exproprié. (L. 16 juin 1851, art. 20.)

196. Pour ce qui regarde la fixation de l’indemnité, il résulte de ce qui précède que la décision du tribunal est souveraine et sans appel. (Ord. 1er oct. 1844, art. 45.) Au contraire, pour les questions étrangères au règlement de l’indemnité qui peuvent s’élever à l’occasion de ce règlement, soit quant au droit de propriété en lui-même, soit quant à la procédure, le jugement du tribunal reste sujet aux voies de recours du droit commun, et dès lors il y a nécessité pour les juges de prononcer par des dispositions distinctes. (Cass. 6 déc. 1864, dir. gén. de l’Algérie ; 2 janv. 1866, Aribaud.)

Le paiement ou la consignation de l’indemnité est, comme en France, le préliminaire indispensable de la prise de possession. (Ord. du 1er oct. 1844, art. 48.)

197. Prise de possession en cas d’urgence. Lorsqu’il y a lieu, en Algérie, d’acquérir par voie d’expropriation et d’occuper immédiatement tout ou partie d’une ou plusieurs propriétés (bâties ou non bâties), pour l’exécution des travaux spécifiés à l’art. 19 de la loi du 16 juin 1851 (suprà, no 192), et que l’urgence ne permet pas d’accomplir les formalités prescrites à cet égard par l’ordonnance du 1er octobre 1844, le gouverneur général de l’Algérie peut, en approuvant ces travaux, déclarer qu’il y sera procédé conformément aux dispositions d’un décret du 11 juin 1858. Cette procédure abrégée laisse subsister des garanties analogues à celles qui résultent du titre VII de la loi du 3 mai 1841. L’indemnité est fixée par le tribunal et les intérêts courent de plein droit du jour de la prise de possession. (Cass. 17 juill. 1865, préfet d’Alger.)

198. Expropriation pour l’ouverture des chemins vicinaux. L’art. 16 de la loi du 21 mai 1836, qui organise un mode spécial de règlement d’indemnité, quand il s’agit de travaux d’ouverture ou de redressement des chemins vicinaux, n’a pas été reproduit par le décret du 5 juillet 1854 (voy. suprà, no 164) ; ce genre de dépossession reste donc régi par l’ordonnance du 1er octobre 1844. Quant aux indemnités dues pour le sol acquis aux chemins en vertu des arrêtés portant reconnaissance et fixation de la largeur des chemins, elles sont réglées comme en France. (Déc. 5 juillet 1854, art. 20.) Il en est de même pour les extractions de matériaux, dépôts ou enlèvements de terre et occupations temporaires auxquels donne lieu la construction des chemins vicinaux.

199. Expropriation en matière de voirie urbaine. Différentes villes d’Algérie ont obtenu l’application du décret du 26 mars 1852, relatif aux rues de Paris, dont l’article final stipule, comme on le sait, que ce décret pourra être appliqué aux villes qui en feront la demande. En particulier, un décret du 26 août 1859, spécial à la ville d’Alger, mais destiné à servir de type pour l’Algérie, a introduit dans le texte de celui du 26 mars 1852 les modifications nécessaires pour le combiner avec l’ordonnance du 1er octobre 1844.

200. Expropriations pour l’irrigation ou le drainage. Les lois relatives aux irrigations, des 29 avril 1845 et 11 juillet 1847, la loi relative au drainage, du 11 juin 1854, et celle du 21 juin 1865, sur les associations syndicales, ont été promulguées en Algérie. Dans le cas prévu par l’art. 18 de cette dernière loi, de travaux exigeant des expropriations, l’utilité publique est déclarée et les indemnités dues sont réglées conformément à l’ordonnance du 1er octobre 1844. Le gouverneur général exerce, conformément aux décrets des 10 décembre 1860 et 7 juillet 1864, les pouvoirs attribués par la loi du 21 juin 1865 au ministre des travaux publics. (Déc. 31 octobre 1866.) Casimir Fournier.

bibliographie.

Annuaire de l’Algérie, paraît tous les ans.

Organisation administrative de l’Algérie dans le Répertoire de Dalloz.