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EXPROPRIATION, 7-9. EXPROPRIATION, 10,11.

travaux concernant ces établissements, la commune intervient concurremment avec les hospices intéressés, et c’est en son nom qu’est rendu, s’il il y a lieu, le décret déclaratif d’utilité publique (Avis de la sect. de l’int. du Conseil d’État 10 sept. 1850). À plus forte raison, une simple association scientifique, littéraire ou de bienfaisance, même reconnue comme établissement d’utilité publique, ne peut-elle agir par voie d’expropriation ainsi l’a reconnu un autre avis de la même section, en date du 1er décembre 18531. Il convient néanmoins de ne pas oublier que l’administration ne procède pas toujours elle-même à l’exécution des travaux elle traite parfois avec des concessionnaires, et le succès de ces traités exige évidemment qu’elle puisse déléguer son droit d’expropriation. De là la disposition écrite dans l’art. 63 de la loi du 3 mai 1841 « Les concessionnaires des travaux publiés exerceront tous les droits conférés à l’administration et seront soumis à toutes les obligations qui lui sont imposées par la présente loi. »

7. Aucune loi n’a défini l’utilité publique, et l’on comprend qu’une telle définition est à peu près impossible. La jurisprudence purement administrative du Conseil d’État ou de sa section de l’intérieur fournirait bien d’assez nombreuses espèces dans lesquelles l’utilité alléguée n’a pas paru assez pressante pour faire fléchir le principe du respect dû à la propriété et pour autoriser l’expropriation ; mais, en général, il n’y a là que des appréciations de circonstances particulières, et la seule règle de conduite que l’on puisse en tirer pour l’administration, c’est que l’expropriation ne doit être employée qu’autant que l’impossibilité d’exécuter autrement un travail déterminé est bien établie.

8. De ce que l’appréciation de l’utilité publique rentre, par sa nature même, dans les attributions discrétionnaires du pouvoir qui la déclare, il suit évidemment que l’acte qui contient cette déclaration ne peut, en thèse générale, donner lieu à aucun recours. Cela va sans dire, d’abord, pour le cas où cet acte est une loi. Cela n’est pas moins certain, en principe, quand il s’agit d’un décret seulement, dans ce dernier cas, la règle comporte une exception, qui dérive elle-même de cette autre règle non moins constante, en vertu de laquelle le recours au Conseil d’État par la voie contentieuse est admis pour cause d’incompétence, d’excès de pouvoir ou de violation de formes substantielles. (Arr. du C. 31 mars 1848.) 9. Mais si l’utilité publique ne se prête ni à une définition légale, ni à un débat juridique, le législateur peut régler les formes dans lesquelles elle doit être constatée, et l’établissement de ces formes a un double avantage d’une part, au point de vue administratif, il est bon que l’administration s’assure, autant que possible, de l’intérêt réel qui recommande tel ou tel projet et des facilités ou des difficultés d’exécution qu’il pourra rencontrer ; d’autre part, les formes sont souvent des garanties, et ici elles ont d’autant plus ce 1. La loi du 24 juillet 1873, qui a autorisé l’archevêché de Paria à exproprier les terrains nécessaires fa la construction d’une

église sur la colline Montmartre, semble avoir méconnu ces pun-

eipes mais ils ne liaient pas le législateur, qui, dès lors, a pu

y déroger.

caractère qu’elles sont placées sous la protection des tribunaux, qui ne doivent prononcer l’expropriation qu’après avoir vérifié l’exacte observation des règles prescrites à cet égard par la loi (art. 2 et 14).

10. La première des formes dont il s’agit consiste dans la loi ou le décret qui autorise l’exécution des travaux. La distinction entre ces deux alternatives a d’abord été établie par l’art. 10 de la loi du 21 avril 1832, puis par les lois des 7 juillet 1833 et 3 mai 1841. L’art. 3 de celle-ci était ainsi conçu

« Tous grands travaux publics, routes royales, canaux, chemins de fer, canalisation des rivières, bassins et docks, entrepris par l’État, les départements, les communes, ou par compagnies particulières, avec ou sans péage, avec ou sans

subside du Trésor, avec ou sans aliénation du domaine public, ne pourront être exécutés qu’en vertu d’une loi qui ne sera rendue qu’après une enquête administrative. Une ordonnance royale suffira pour autoriser l’exécution des routes départementales, celle des canaux et chemins de fer d’embranchement de moins de 20,000 mètres de longueur, des ponts et de tous autres travaux de moindre importance. Cette ordonnance devra également être précédée d’une enquête. Ces enquêtes auront lieu dans les formes déterminées par un règlement d’administration publique.» u

La part ainsi faite au pouvoir législatif avait été notablement restreinte par l’art. 4 du sénatusconsulte du 25 décembre 1852. Mais la loi du 27 juillet 1870 est revenue, en grande partie, au régime de 1841. Elle porte

Art. 1er. Tous grands travaux publics, routes impériales,

canaux, chemins de fer, canalisation des rivières, bassins et

docks, entrepris par l’État ou par compagnies particulières, avec ou sans péage, avec ou sans subside du Trésor, avec ou sans aliénation du domaine public, ne pourront être autorisés que par une loi rendue après une enquête administrative. Un décret impérial, rendu en la forme des règlements d’administration publique et également précédé d’una enquête, pourra autoriser l’exécution des canaux et chemins de fer d’embranchement de moins de 20 kilomètres de longueur, des lacunes et rectifications de routes impériales, des ponts et de tous autres travaux de moindre importance. En aucun cas, les travaux dont la dépense doit être supportée en tout ou en partie par le Trésor ne pourront être mis à exécution qu’en vertu de la loi qui crée les voies et moyens ou d’un crédit préalablement inscrit à un des chapitres du budget.

Art. 2. Il n’est rien innové, quant à présent, en ce qui touche l’autorisation et la déclaration d’utilité publique des travaux publics à la charge des départements et des communes Il. Les formes dans lesquelles doit être faite l’enquête sont déterminées, pour les travaux publics en général, par deux ordonnances des 18 février 1834 et 15 février 1835, et pour les travaux communaux, par une ordonnance du 23 août 1835, au texte desquelles il suffit de renvoyer (voy. Enquête). Remarquons seulement 1° que les travaux d’ouverture ou de redressement des chemins vicinaux ne sont pas soumis à ces régies et continuent à être régis par l’art. 16 de la loi du 21 mai 1836 (voy. Chemins vicinaux) 2° qu’il n’y a lieu de procéder aux enquêtes et de remplir les formalités établies par les ordonnances précitées qu’autant qu’il s’agit d’arriver à une déclaration d’utilit ? publique et à l’expropriation qui en sera la conséquence qu’ainsi tout travail qui pourrait être exécuté sans expropriation sera valablement auto1. Toy. à cet égard les lois des t8 juillet 1 837, 10 mai 1838, 12 juillet 1805, 18 juillet 1866, 24juillet 1867 et lOaoût 1871.