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ALGÉRIE, 27-32

torité préfectorale (art. 2). Pour leur en donner les moyens, un arrêté du gouverneur général du 11 juin 1870 avait détaché des préfectures et mis à leur disposition un bureau administratif chargé de la préparation et de l’expédition des affaires civiles.

27. Le Gouvernement de la défense nationale, trouvant les choses en cet état, put bien décréter que les trois départements de l’Algérie constitueraient à l’avenir un seul et même territoire. (Déc. 24 octobre 1870, art. 4.) Mais il fut ajouté que « néanmoins, jusqu’à ce qu’il en eût été décidé autrement, les populations européennes et indigènes établies dans les territoires dits actuellement territoires militaires, continueraient à être administrées par l’autorité militaire. » Une tentative d’organisation civile fut faite par le décret du 24 décembre 1870 ; l’article 1er décida que, dans toute l’étendue du Tell[1], seraient détachés des territoires dits militaires et passeraient immédiatement sous l’autorité civile tous les territoires de tribus contigus aux territoires civils actuellement existants ; mais l’absence de toute mesure efficace pour assurer le fonctionnement de l’administration civile a empêché l’exécution de ce décret jusqu’au moment où, comme nous le dirons bientôt, elle a été reprise par la création des circonscriptions cantonales, création qui n’a pu être que partielle, mais qui peut devenir l’instrument de l’assimilation.

Sect. 2. — Administration des territoires civils.
art. 1. — préfets, sous-préfets, commissaires civils, chefs de circonscription cantonale.

28. Préfets. Le territoire civil de chaque département est administré par un préfet, sous l’autorité du gouverneur général civil. (Déc. 31 mai 1870, art. 1er ; 24 octobre 1870, art. 7.) Le préfet a sous ses ordres les chefs des différents services civils et financiers dont l’action s’étend sur les deux territoires. D’après un arrêté du commissaire extraordinaire, en date du 3 décembre 1870, ces services sont ceux du cadastre, de la topographie, des ponts et chaussées, des mines et forages, de l’enregistrement et des domaines, des contributions diverses, des forêts. Les postes et la télégraphie relèvent directement du gouverneur général.

Suivant le même arrêté « il résulte formellement des termes du décret du 24 octobre 1870 que les agents de ces divers services relèvent directement de l’autorité civile, représentée au chef-lieu de chaque département par le préfet, et que si, au territoire dit militaire, ils doivent fonctionner sous l’impulsion de l’autorité chargée de l’administration civile et en vertu de ses réquisitions, ces réquisitions doivent leur être transmises par leur supérieur direct, qui est le préfet ; que c’est également vis-à-vis de ce fonctionnaire qu’ils sont responsables de l’exécution du service accompli en territoire dit militaire. »

29. L’autorité du préfet, en Algérie, est de la même nature que celle des préfets en France ; elle s’exerce à peu près dans les mêmes conditions, car le décret du 27 octobre 1858 qui, après la création du ministère spécial, avait réglementé l’organisation administrative en Algérie, avait emprunté au décret du 25 mars 1852 la décentralisation administrative, et une décision impériale du 21 décembre 1861 avait promulgué en Algérie, sous certaines modifications, le décret du 13 avril 1861 portant extension des attributions des préfets et des sous-préfets. La nomenclature des emplois auxquels les préfets nomment directement est contenue dans un tableau annexé à l’article 10 du décret du 27 octobre 1858 ; elle est à peu près calquée sur celle qui est renfermée dans l’art. 5 du décret du 25 mars 1852. De même, on retrouvera, dans les tableaux annexés à l’art. 11 du décret du 27 octobre 1858, les affaires générales, départementales et communales qui sont énumérées dans les tableaux annexés aux décrets de 1852 et de 1861. Comme en France, les préfets statuent tantôt en conseil de préfecture, tantôt sans l’intervention de ce conseil. La forme de leurs actes et l’autorité qui s’y attache est absolument la même que dans la métropole.

30. Sous-préfets et commissaires civils. La division du département en arrondissements, introduite par l’arrêté du 9 décembre 1848, subsiste en principe ; mais quelques arrondissements seulement ont des sous-préfets. Aux termes de l’art. 20 du décret du 2 juillet 1864 « les sous-préfets relèvent directement du préfet, qui peut leur déléguer ses attributions pour statuer sur les affaires d’intérêt local qui exigeaient jusqu’à ce jour la décision préfectorale. » Les sous-préfets, indépendamment de cette délégation facultative, exercent les attributions déléguées aux sous-préfets de la métropole par le décret du 13 avril 1861, et statuent en outre sur diverses affaires civiles énumérées par la décision impériale du 21 décembre 1861 ; ainsi, ils délivrent les alignements et nivellements et autorisent les établissements insalubres de troisième classe.

31. Les commissariats civils sont une institution transitoire destinée à disparaître par l’organisation des territoires civils ; elle a servi et sert encore à protéger, dans les territoires où ils se fixaient, les groupes d’Européens qui allaient s’établir dans l’intérieur, sur des points où la conquête avait créé des intérêts.

Les commissaires civils, dont la création remonte à 1834, mais dont l’organisation n’avait été réellement fixée que par l’arrêté ministériel du 18 décembre 1842, avaient des attributions à la fois administratives et judiciaires. Le décret du 7 juillet 1864 a maintenu les premières, en décidant (art. 21 ) que les commissaires civils auraient, dans leur ressort, les mêmes attributions que les sous-préfets. Ils relèvent soit directement du préfet, soit du sous-préfet à l’arrondissement duquel leur district est rattaché. — Quant à leurs attributions judiciaires, ils sont placés sous le contrôle et la surveillance du procureur général.

32. Circonscriptions cantonales. En retirant à l’autorité militaire l’administration d’une grande partie des territoires qui lui avaient été exclusivement soumis jusque-là, le décret du 24 décembre 1870 n’avait rien fait pour instituer dans ces territoires une administration civile, si ce n’est

  1. Le Tell, portion essentiellement cultivable du territoire algérien, s’étend de la Méditerranée au plateau central qu’il englobe en partie. La superficie du Tell est de 13,146,000 hectares ; au delà du Tell s’étend le Sahara algérien.