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AGENTS DE CHANGE, 41-51.

41. Le cautionnement doit être versé exclusivement en numéraire, dans les caisses du Trésor. (L. 28 avril 1816 ; Ord. roy. 8 mai 1816 et 31 mai 1838.) Il porte, à dater de son versement, un intérêt qui échoit annuellement au 1er janvier, et dont le taux est maintenant arrêté à 3 p. cent., conformément à la loi du 4 août 1844. Cet intérêt ne se touche qu’à la caisse du trésorier-payeur général du département, où l’agent de change exerce ses fonctions.

Le cautionnement des agents de change est, au surplus, assujetti à toutes les règles relatives au cautionnement des officiers publics. (Voy. Cautionnement.)

42. Le cautionnement des agents de change peut être fourni pour eux par des tiers qui sont en droit de se réserver sur lui un privilége de deuxième ordre, c’est-à-dire d’être remboursés sur son montant par préférence aux autres créanciers, après imputation, s’il y a lieu, de ce montant à la garantie pour laquelle il est exigé.

43. La garantie à laquelle le cautionnement est ainsi affecté par privilége de premier ordre, se rapporte aux faits de charge, c’est-à-dire à l’accomplissement des obligations de l’agent de change vis-à-vis d’autrui dans l’exercice de ses fonctions. L’appréciation des faits de charge susceptibles de donner ouverture à la responsabilité pécuniaire des agents de change, appartient aux tribunaux ; elle n’est, en aucun cas, du domaine de l’administration. Il n’y a donc pas lieu d’examiner ici ces faits.

Sect. 3. — Serment, installation.

44. L’agent de change, nanti de sa commission, la présente, avec le récépissé de son cautionnement, au tribunal de commerce, devant lequel il prête serment.

45. La prestation de serment emporte installation dans les fonctions. Sur les places où il existe des chambres syndicales, elle est suivie, aux termes de la plupart des règlements de discipline intérieure adoptés par ces chambres, d’une réception officielle du nouvel agent de change par la compagnie.

Sect. 4. — Patente.

46. L’agent de change installé est obligé de se pourvoir d’une patente, dont le taux est déterminé par la loi du 25 avril 1844, proportionnellement à la population de la place et à son commerce ; savoir :

Fr.
À Paris 
 1000
Dans les villes de 100,000 âmes et au-dessus. 
 250
Dans les villes de 50,000 à 100,000 âmes 
 200
Dans les villes de 30,000 à 50,000 âmes (et dans celles de 15,000 à 30,000 âmes qui ont un entrepôt réel) 
 150
Dans les villes de 15,000 à 30,000 âmes (et dans celles d’une population inférieure, qui ont un entrepôt réel) 
 100
Les autres villes 
 75

À ce droit fixe s’ajoute toujours le droit proportionnel du 10e de la valeur locative. (Loi du 29 mars 1872.)

CHAP. IV. — ATTRIBUTIONS.
Sect. 1. — Caractères.

47. Les agents de change sont des officiers publics.

48. La loi qui leur interdit formellement de faire aucun acte de commerce (C. de com., art. 85 et 86), semble mettre un empêchement absolu à ce qu’ils soient considérés comme commerçants. Néanmoins, la doctrine des auteurs et la jurisprudence du ministère de l’agriculture et du commerce, avaient admis l’opinion contraire. On se fondait sur l’analogie qui subsiste entre le régime actuel de la profession et l’ancien régime, qui la classait parmi les professions commerciales ; on s’appuyait de ce que les dispositions qui s’y rapportent sont placées dans le Code de commerce ; on remarquait que ce Code oblige les agents de change à tenir un livre assimilé aux livres de commerce (art. 84), et qualifie d’acte de commerce (art. 632) toute opération de courtage, expression générique qui désigne aussi bien l’entremise dans les opérations de banque, change, etc., que l’entremise pour la vente de marchandises ; enfin, on constatait que les agents de change agissent souvent en fait à l’instar des commissionnaires. Dès lors, on concluait que la profession d’agent de change constitue une sorte de négoce par elle-même et que la loi n’y contredit pas, si les art. 85 et 86 du Code de commerce ne sont pas pris dans un sens trop littéral.

49. Telle n’était pas l’appréciation du ministère de la justice. Le garde des sceaux estimait que les termes du Code sont trop absolus pour prêter à la discussion. On ajoutait que l’exercice de la profession d’agent de change qui se réduit à l’accomplissement sur réquisition d’un devoir tracé par la loi, manque des deux conditions essentielles et caractéristiques de tout acte de commerce, savoir : la spontanéité dans les opérations entreprises et les chances aléatoires du profit. On aurait pu se prévaloir en outre de ce que l’entremise des agents de change, loin de se rapporter exclusivement à la négociation de valeurs commerciales entre commerçants, a maintenant pour objet principal la négociation, entre particuliers non commerçants, de valeurs non commerciales, comme la rente, ou de valeurs qui n’ont de commercial qu’une forme purement conventionnelle.

50. À la suite d’une controverse prolongée sur la question entre le département de la justice et celui de l’agriculture et du commerce, la solution en a été déférée au Conseil d’État. Le Conseil, par un avis en date du 14 avril 1853, très-justement motivé, considérant que les agents de change sont institués par le chef du Gouvernement, et assujettis à un cautionnement, d’où résulte pour eux le caractère d’officiers ministériels, parmi lesquels l’art. 91 de la loi du 28 avril 1816 les a nommément rangés ; considérant que la qualité d’officier ministériel est incompatible avec tout commerce, s’est prononcé en faveur de l’opinion du garde des sceaux. Ainsi il demeure décidé, à moins qu’une loi n’intervienne, que les agents de change ne sont pas commerçants.

Sect. 2. — Privilége.

51. Les agents de change sont privilégiés, c’est-à-dire :

1o Que les opérations de leur ministère leur sont exclusivement réservées sur les places où ils sont institués ;

2o Que certaines de ces opérations ne sont ja-