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CONSEIL D’ÉTAT, 66-74

moins du jour où le ministre a reçu la décision qu’il attaque. En matière répressive, il court du jour même où l’arrêté a été rendu. (L. 30 mai 1851, art. 25. Arr. 1er mai 1869, Guilhou.)

66. Le pourvoi n’est pas suspensif, à moins qu’il n’en ait été autrement ordonné par le Conseil d’État. Cette règle, écrite dans l’art. 3 du décret du 22 juillet 1806 et qui a paru commandée par les nécessités de l’administration, a été confirmée par l’art. 24 de la loi du 24 mai 1872. La loi ajoute que néanmoins les conseils de préfecture pourront subordonner l’exécution de leurs décisions, en cas de recours, à la charge de donner caution ou de justifier d’une solvabilité suffisante. Le Conseil d’État prononce rarement des arrêts de sursis.

ART. 2. — INSTRUCTION DES AFFAIRES.

67. L’instruction de l’affaire est dirigée par la section du contentieux du Conseil d’État. Cette attribution lui appartient depuis la création de la commission du contentieux en 1806 ; elle lui a été maintenue par toutes les lois sur le Conseil d’État et notamment par l’art. 15 de la loi du 24 mai 1872.

68. La section ordonne avant tout la mise en cause de l’adversaire. Pour les pourvois formés par le ministère d’un avocat, si l’adversaire est un particulier ou une personne morale autre que l’État, par exemple une commune, le président, sur la décision de la section, rend une ordonnance de soit communiqué (voy. ce mot) qui doit être signifiée par huissier, dans le délai de 2 mois, à peine de déchéance du pourvoi. (D. 22 juill. 1806, art. 4 ; D. 2 nov. 1864, art. 3.)

S’il s’agit de pourvois formés au nom de l’État ou contre l’État, ou d’un recours formé dans les matières où le ministère des avocats n’est pas obligatoire, la communication se fait par la voie administrative.

L’adversaire doit répondre dans les délais fixés par l’art. 4 du décret du 22 juillet 1806, sinon il est passé outre. En cas d’urgence, les délais peuvent être abrégés par la section.

La section peut, en communiquant les dossiers aux ministres, fixer le délai dans lequel ils devront répondre. (Art. 8 du D. du 2 nov. 1864.)

69. L’intervention d’une partie qui se croit intéressée, bien qu’elle n’ait pas été mise en cause par la section, peut être admise. Le Conseil est juge de l’intérêt et il est très-large à cet égard. Elle est communiquée aux parties en cause. (Art. 21 du Règl. de 1806).

70. Le décret de 1806 contient encore diverses règles sur les vérifications d’écritures (art. 14), l’inscription de faux (art. 20), les reprises d’instance (art. 22), la constitution de nouvel avocat et le désaveu (art. 24 à 26), qui sont rarement appliquées.

Le Conseil d’État peut en outre ordonner des expertises et des enquêtes ; aucune forme spéciale ne lui est imposée dans ce cas.

ART. 3. — JUGEMENT.

71. Quand l’affaire est instruite, elle revient entre les mains du rapporteur désigné par le président de la section. L’examen de l’affaire et le jugement peuvent avoir lieu dans des formes différentes, suivant qu’elle a été introduite avec le ministère d’un avocat ou sans cet intermédiaire.

Examinons d’abord le cas des affaires introduites par le ministère d’un avocat.

Le rapport est fait par écrit à la section du contentieux. La section ne peut délibérer que si trois au moins de ses membres, ayant voix délibérative, sont présents. En cas de partage, on appelle le plus ancien maître des requêtes présent à la séance. (L. 1872, art. 15.)

La section, après avoir entendu et discuté le rapport, arrête un projet de décision. Le dossier est alors communiqué à l’un des trois maîtres des requêtes désignés par le président de la République pour remplir les fonctions de commissaire du Gouvernement.

Le rôle de la séance publique, proposé par le commissaire du Gouvernement, est arrêté par le président. Il est imprimé et distribué, quatre jours au moins avant la séance, à tous les conseillers d’État de service à l’assemblée du Conseil délibérant au contentieux. (Art. 23, Règl. 21 avril 1872.) Les avocats dont les affaires doivent être appelées reçoivent communication non-seulement de ce rôle, mais des questions posées par les rapports faits au nom de la section. (L. 1872, art. 18.)

72. L’assemblée du Conseil d’État statuant au contentieux ne peut délibérer qu’en nombre impair. Ce système établi par la loi de 1849, abandonné en 1852, et qui a pour but d’éviter les partages, donne lieu à d’assez grandes complications. De plus, l’assemblée ne décide valablement que si neuf membres au moins ayant voix délibérative, y compris le maître des requêtes rapporteur, sont présents. Pour compléter l’assemblée, les conseillers d’État absents ou empêchés peuvent être remplacés par des conseillers d’État en service ordinaire en suivant l’ordre du tableau. (Art. 21, L. 1872.)

73. Le rapport est lu à l’assemblée ainsi constituée. Après le rapport, les avocats présentent leurs observations orales. Le commissaire du Gouvernement donne ses conclusions dans chaque affaire. (Art. 18, L. 1872.) Il n’est pas appelé, comme on le croit quelquefois, à soutenir l’intérêt de l’administration, il soutient la solution qui lui paraît la plus conforme à la loi et à la justice.

Quand le Conseil a entendu un certain nombre d’affaires, il délibère à huis clos.

Les art. 88 et suivants du Code de procédure civile sur la police des audiences, sont applicables à l’assemblée publique du Conseil d’État délibérant au contentieux. (L. 1872, art. 24.)

74. Telle est la marche suivie pour le jugement des affaires portées en audience publique. Mais les affaires introduites sans l’intermédiaire d’un avocat sont jugées par la section seule en vertu de l’art. 19 de la loi de 1872, à moins que le renvoi n’ait été demandé par l’un des conseillers d’État de la section ou par le commissaire du Gouvernement. Pour ces affaires, les rapports sont communiqués directement au commissaire du Gouvernement qui prépare ses conclusions, et lorsqu’il y en a un nombre suffisant, il est tenu une séance non publique de la section qui statue après avoir entendu le rapporteur et le commissaire du Gouvernement.

Le règlement du 21 août 1872 dispose (art.