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CONSEIL D’ÉTAT, 48-54

ment statuerait sur certaines affaires concernant des intérêts généraux, des intérêts collectifs et même des intérêts privés, ont disposé qu’il y serait statué par ordonnance ou décret rendu dans la forme des règlements d’administration publique, entendant prescrire par là l’intervention obligatoire du Conseil d’État en assemblée générale. On peut consulter, par exemple, l’art. 5 de la loi du 11 germinal an XI, relative aux changements de nom, et l’art. 47 de la loi du 10 août 1871.

En outre, les traditions ont amené un certain nombre de ministères à soumettre constamment au Conseil d’État ou à la section correspondant à leur ministère des affaires qui soulevaient des questions de droit ou des luttes d’intérêt d’une certaine délicatesse, sur lesquelles il était utile que les principes fussent établis et maintenus par une jurisprudence dont l’autorité couvrit la responsabilité du ministre.

48. Les attributions du Conseil en matière administrative dérivant de ces diverses origines sont fort étendues. Ainsi, pour ne citer que les plus importantes, il est associé à la surveillance du Gouvernement sur les actes de diverse nature qu’entraîne la pratique des cultes, soit au point de vue spirituel, soit au point de vue de l’administration temporelle.

Il participe au contrôle qu’exerce le Chef de l’État sur l’administration des départements et des communes : il est consulté sur la création des établissements publics ou d’utilité publique, et sur les actes importants de l’administration de ces établissements.

Il est appelé à préparer un grand nombre d’actes qui concernent le service des travaux publics : l’autorisation des travaux, routes, ponts, canaux, concessions de chemins de fer et desséchements de marais. Les pouvoirs du Gouvernement sur ce point avaient été étendus à tous les travaux par le sénatus-consulte du 25 décembre 1852. La loi du 27 juillet 1870 a réservé au pouvoir législatif l’approbation des travaux importants. Mais le Conseil d’État, qui doit être consulté, d’après cette dernière loi, sur les travaux autorisés par le Chef de l’État, peut l’être et l’est ordinairement sur ceux qui doivent être soumis au pouvoir législatif.

Les concessions de mines et de prises d’eau sur les cours d’eau navigables sont aussi examinées en Conseil d’État.

Les services financiers réclament également son concours. C’est ainsi que toutes les pensions accordées aux fonctionnaires civils ou aux militaires de l’armée de terre et de mer, sont révisées en Conseil d’État.

Nous bornons là cette énumération qui ne pourrait pas être complétée utilement. Pour savoir si une décision du Gouvernement, prise sans le concours du Conseil d’État, est irrégulière, il faut rechercher dans la loi de la matière si l’intervention du Conseil est expressément prescrite.

Sect. 2. Mode de procéder.

49. Les règles relatives au mode da procéder du Conseil d’État sont écrites dans le règlement intérieur du Conseil, en date du 21 août 1872, fait en vertu de la délégation, donnée par l’art. 10 de la loi du 24 mai précédent.

Il y a dans ce décret beaucoup de règles de détail concernant l’ordre intérieur des travaux du Conseil, la distribution du travail entre ses membres, les congés et les vacances. Nous n’avons pas à les reproduire ; il suffit de les mentionner. Nous laissons aussi de côté, en ce moment, les règles spéciales au jugement des affaires contentieuses. Mais il est utile de faire remarquer ici que le Conseil délibère dans trois formes différentes : en sections, en sections réunies, en assemblée générale.

50. Toutes les affaires ne sont pas examinées en assemblée générale. Il y en a un grand nombre qui ne sont examinées que par la section correspondant au ministère d’où elles proviennent. D autres le sont par deux ou plusieurs sections réunies. Mais l’assemblée générale n’est jamais saisie directement, elle n’examine les affaires qu’après l’étude préalable d’une ou de plusieurs sections.

Les sections sont réunies, soit sur la demande du Gouvernement, soit en vertu d’une décision du ministre de la justice, qui peut être provoquée par le vice-président du Conseil, suivant les besoins du service.

51. Le règlement du Conseil détermine quelles sont les affaires qui sont soumises à l’assemblée générale. L’art. 5 du règlement du 21 août 1872 contient à cet égard une longue nomenclature en 28 paragraphes, en tête de laquelle se trouvent naturellement les projets de loi et de règlement d’administration publique, et qui se termine ainsi : « Enfin les affaires qui, à raison de leur importance, sont renvoyées à l’examen de l’assemblée générale, soit par les ministres, soit par les présidents de sections, d’office ou sur la demande de la section. »

Les convocations à l’assemblée générale sont accompagnées d’un ordre du jour qui indique les affaires importantes soumises à l’examen du Conseil.

52. D’après l’art. 12 de la loi du 24 mai 1872, les sections administratives ne peuvent délibérer valablement que si trois conseillers en service ordinaire sont présents. En cas de partage, la voix du président est prépondérante. Quant au Conseil d’État en assemblée générale, il ne peut délibérer si treize au moins de ses membres ayant voix délibérative, y compris par conséquent les conseillers en service extraordinaire et les maîtres des requêtes rapporteurs, ne sont présents. En cas de partage, la voix du président est également prépondérante.

53. Il nous reste indiquer une disposition spéciale à la préparation des lois et des règlements d’administration publique. L’art. 11 du règlement du 21 août 1872 porte que, pour ces travaux, la section compétente peut, avec l’agrément du garde des sceaux, appeler dans son sein ceux des conseillers d’État ou des maîtres des requêtes dont elle croit devoir réclamer le concours.

CHAP. IV. ATTRIBUTION ET MODE DE PROCÉDER DU CONSEIL EN MATIÈRE DE CONTENTIEUX ADMINISTRATIF.

Sect. 1. Attributions.

54. Les attributions et le mode de procéder du Conseil en matière de contentieux administratif ont un caractère tout spécial.

On a vu dans les notions historiques présentées