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CONSEIL D’ÉTAT, 32-39

des travaux du Conseil et la distribution des affaires entre les sections.

32. L’importance politique que le Conseil d’État avait prise sous le second Empire entraîna sa suspension lors de la révolution du 4 septembre 1870. Une commission provisoire, dans laquelle 8 membres remplissaient les fonctions de conseiller d’État et à laquelle étaient attachés 10 maîtres des requêtes et 12 auditeurs, fut chargée, par décret du 15 septembre 1870, d’expédier les affaires urgentes. Cette commission a fonctionné jusqu’au mois d’août 1872, époque où la loi du 24 mai 1872, qui réorganisait le Conseil d’État, a été mise à exécution.

33. Le législateur de 1872 a reconnu une fois de, plus que, sous tous les régimes, le Conseil d’État était appelé à rendre de grands services, et, après quelques hésitations, il a pensé que l’organisation et le mode de procéder qui avaient été à peu près constamment pratiqués de l’an VIII à 1870 étaient ceux qui répondaient le mieux à la nature de l’institution. Il n’a fait que trois emprunts au système spécial suivi en 1849 : la nomination des conseillers d’État par l’Assemblée nationale, le pouvoir propre de juridiction conféré au Conseil d’État en matière contentieuse, et l’institution d’un tribunal spécial pour juger les conflits entre l’autorité administrative et l’autorité judiciaire. Sur le premier point, l’Assemblée elle-même a déjà retouché son œuvre et la loi du 25 février 1875 sur l’organisation des pouvoirs publics, qui institue une Chambre des députés et un Sénat, a rendu au Gouvernement le droit de nommer les conseillers d’État.

Nous avons à étudier maintenant l’organisation, les attributions et le mode de procéder du Conseil d’État d’après la nouvelle législation et d’après les dispositions des lois antérieures qui sont restées en vigueur.

CHAP. II. ORGANISATION ACTUELLE.

Sect. 1. Personnel du Conseil d’État.

34. Le Conseil d’État se compose : 1o des ministres ; 2° de 22 conseillers d’État en service ordinaire, y compris le vice-président et les présidents de section, et de 15 conseillers d’État en service extraordinaire ; 3° de 24 maîtres des requêtes ; 4° de 30 auditeurs. Un secrétaire général qui a rang et titre de maître des requêtes est placé à la tête des bureaux du Conseil.

35. La présidence du Conseil appartient au garde des sceaux, ministre de la justice, qui peut également présider les sections, et qui a toujours voix délibérative, sans pouvoir toutefois siéger quand le Conseil prononce en matière contentieuse. (Art. 2, L. 24 mai 1872.) En cas d’absence, le garde des sceaux est remplacé par le vice-président du Conseil d’État.

Les autres ministres ont rang et séance à l’assemblée général du Conseil d’État, mais ils n’ont voix délibérative que pour les affaires qui dépendent de leur ministère, sans pouvoir non plus siéger au contentieux.

36. La loi du 24 mai 1872 avait, dans son art. 3, établi que les conseillers d’État en service ordinaire seraient élus par l’Assemblée nationale, qu’ils seraient renouvelés par tiers tous les trois ans et ne pourraient être révoqués que par l’Assemblée. Le Gouvernement avait seulement le droit de les suspendre pendant un temps qui ne pouvait excéder deux mois.

Ce système a été abrogé par l’art. 4 de la loi du 25 février 1875 qui donne au président de la République le droit de nommer et de révoquer les conseillers d’État en service ordinaire par décret délibéré en conseil des ministres. Mais la situation des conseillers d’État élus par l’Assemblée, en exécution de la loi du 24 mai 1872, a été maintenue ; ils restent soumis au renouvellement par tiers ; ils ne peuvent jusque-là être révoqués que par l’Assemblée et, après sa séparation, par le Sénat. Le président de la République a une latitude complète pour choisir les conseillers d’État ; la loi n’impose d’autres conditions que l’âge de 30 ans (art. 6).

Le vice-président du Conseil et les présidents de section sont nommés par le président de la République et choisis parmi les conseillers en service ordinaire.

37. Quant aux conseillers d’État en service extraordinaire, la loi du 24 mai 1872 (art. 5) avait déjà donné au président de la République le droit de les nommer. La loi nouvelle a repris le titre usité sous la monarchie constitutionnelle pour désigner les personnages investis d’autres fonctions et appelés à participer aux travaux du Conseil et qui, sous le régime du décret de 1852, portaient le nom de conseillers en service ordinaire hors sections. Mais il est à remarquer que, d’après la loi de 1872, les conseillers de cette catégorie n’ont voix délibérative que dans les affaires qui dépendent du département ministériel auquel ils appartiennent, et que dans les autres affaires ils ont seulement voix consultative. Le législateur a voulu que le Conseil d’État pût profiter des lumières que les chefs de service appelés aux fonctions de conseiller d’État en service extraordinaire puisent dans la pratique des affaires, mais il a tenu à maintenir la prépondérance des conseillers attachés au service ordinaire.

Les conseillers en service extraordinaire perdent leur titre, de plein droit, dès qu’ils cessent d’appartenir à l’administration active.

Les conseillers d’État, lorsqu’ils quittent leurs fonctions, peuvent être nommés conseillers honoraires (art. 7).

38. Les maîtres des requêtes sont nommés par décret. Nul ne peut être appelé à ces fonctions s’il n’a vingt-sept ans. Le vice-président et les présidents de section doivent faire, en cas de vacances, des présentations. Les maîtres des requêtes ne peuvent être révoqués que par un décret individuel, rendu après avis des présidents (art. 5 et 6). Ils ont voix délibérative dans les affaires dont le rapport leur est confié, et voix consultative dans les autres (art. 11).

En quittant leurs fonctions, ils peuvent être nommés maîtres des requêtes honoraires (art. 7).

39. Les auditeurs sont divisés en 2 classes, dont la première se compose de 10 et la seconde de 20. Ils sont nommés au concours. Les conditions de ces concours sont fixées soit dans la loi du 24 mai 1872, modifiée par celle du 1er  août 1874, soit dans deux règlements d’administration publique faits par le Conseil d’État, en vertu de la