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CONFLIT, 99-101

l’art. 7 de l’ordonnance du 12 décembre 1821, qui, en cas de conflit, sur les observations des parties, défend de prononcer, quelque jugement qui intervienne, aucune condamnation de dépens, mais a empiété sur l’autorité administrative, méconnu les limites de sa compétence et commis un excès de pouvoir ;

« Attendu que, dans ces circonstances, cette condamnation aux dépens étant nulle, ne peut produire aucun effet contre le fonctionnaire public qui en a été frappé ;

« Faisant droit sur le réquisitoire du procureur général annule en vertu de l’art. 80 de la loi du 27 ventôse an VIII, pour excès de pouvoir, le jugement du tribunal de première instance de Brest, du 21 janvier 1835, dans la disposition seulement qui condamne à la moitié des dépens de l’incident du renvoi le préfet du département du Finistère, etc. »

Cette jurisprudence a été encore confirmée par un autre arrêt de la même Cour, du 21 juillet 1874, et par diverses décisions, soit du Conseil d’État (12 déc. 1868, 21 oct. 1871), soit du Tribunal actuel des conflits. (18 juill. 1874.)

art. 6. — envoi du jugement au préfet ;
registre des conflits.

99. Lorsque le tribunal a statué sur le déclinatoire, soit qu’il l’ait accueilli, soit qu’il l’ait rejeté, et quels que soient les motifs par lesquels il l’a rejeté, sa décision doit être portée à la connaissance du préfet : c’est encore une des obligations imposées aux magistrats de l’ordre judiciaire. L’art. 7 de l’ordonnance de 1828 dispose :

« Après que le tribunal aura statué sur le déclinatoire, le procureur du Roi adressera au préfet, dans les cinq jours qui suivront le jugement, copie de ses conclusions ou réquisitions et du jugement rendu sur la compétence. La date de l’envoi sera consignée sur un registre à ce destiné. »

En fait, le délai de 5 jours, que cet article a établi dans la pensée d’accélérer la procédure du conflit, est souvent dépassé. L’inobservation de cette prescription, dont l’exécution est confiée aux magistrats du parquet, ne peut, ainsi que nous le verrons sur l’art. 8, entraîner la nullité du conflit ; elle est, dès lors, aussi dénuée de sanction légale que l’obligation morale de statuer promptement sur le déclinatoire. Il est juste, néanmoins, de reconnaître qu’ici les retards proviennent quelquefois de ceux qu’entraine la rédaction des qualités des jugements[1] : on pourrait sans doute les éviter et satisfaire au texte de l’ordonnance, en se contentant d’adresser au préfet les motifs et le dispositif du jugement, qui sont l’œuvre propre du tribunal, et qui peuvent être habituellement rédigés et expédiés dans les 5 jours : mais, d’un autre côté, le jugement sera plus facile à comprendre, plus utilement consulté par le préfet, s’il est complet, c’est-à-dire s’il contient l’exposé des points de fait et de droit, les conclusions des parties, etc.

Quoi qu’il en soit, il importe de remarquer que l’envoi du jugement doit être accompagné d’une copie des conclusions ou réquisitions prises par le ministère public, soit qu’elles aient eu pour objet d’appuyer le déclinatoire ou de le combattre. Au premier cas, ainsi que le dit M. Taillandier (p. 164), elles pourront servir au préfet dans la redaction de son arrêté de conflit ; au second cas, elles pourront l’éclairer et le porter à se désister de ses prétentions.

100. La date de renvoi sera consignée sur un registre à ce destiné. Ce registre, qui doit être établi dans les parquets de première instance et dans les parquets des cours d’appel, fait connaître les diverses phases de la procédure des conflits. Il doit mentionner et constater les dates : 1o de l’envoi du déclinatoire au parquet ; 2° de la communication de ce déclinatoire au tribunal et des réquisitions prises par le ministère public ; 3° de l’envoi au préfet du jugement rendu sur le déclinatoire 4° de la signification de l’acte d’appel, s’il y a eu appel 5° du dépôt de l’arrêté de conflit et du récépissé qui en est délivré ; 6° de la communication de cet arrêté au tribunal ; 7° des réquisitions à fin de sursis et du jugement qui intervient ; 8° du rétablissement des pièces an greffe ; 9° de l’avis donné aux parties, conformément à l’art. 13 ; 10° de la remise des observations des parties au parquet, s’il y a lieu ; 11° enfin, de l’envoi fait au ministère de la justice, conformément à l’art. 14. (Circ. du min. de la justice 5 juill. 1828.)

Lorsque ce registre est régulièrement tenu, il sert exclusivement à établir l’accomplissement des diverses formalités prescrites par l’ordonnance ; ses énonciations peuvent donc, selon les cas, conduire à prononcer la nullité du conflit. C’est ainsi que le Conseil d’État a annulé comme tardif (16 mai 1863) un conflit qui, d’après les énonciations du registre avait été déposé au greffe après le délai de quinzaine fixé par l’art. 8, encore bien que le préfet prétendit n’avoir reçu que dans les 15 jours antérieurs à son arrêté la notification de l’arrêt portant rejet de son déclinatoire. Le premier tribunal des conflits est même allé jusqu’à décider (18 avril 1850) que les constatâtions du registre devaient prévaloir sur la preuve acquise de leur inexactitude. Cette solution, sur le mérite de laquelle il est permis d’élever des doutes, atteste du moins l’importance du registre de mouvement, établie également par les art. 7 et 14 de l’ordonnance, qui lui attribuent l’effet de constater le point de départ de délais établis à peine de déchéance du conflit. Cependant il a existé longtemps un certain nombre de parquets de première instance dans lesquels ce registre n’était pas tenu ; un simple certificat remplaçait alors, en cas de conflit, l’extrait du registre. Ce fait s’expliquait peut-être pour les tribunaux qui, pendant de longues années, n’avaient pas vu un seul conflit ; il n’en est pas moins à désirer que les prescriptions de l’ordonnance à cet égard reçoivent partout leur exécution.

Sect. 7. — Des délais et des formes dans lesquels doit être élevé le conflit.

ART. 1. DÉLAIS POUR ÉLEVER LE CONFLIT, SELON LES DIVERS CAS PRÉVUS PAR L’ART. 3.

101. L’art. 8 est ainsi conçu :

« Si le déclinatoire est rejeté dans la quinzaine de cet envoi[2] pour tout délai, le préfet du département, s’il estime qu’il y ait lieu, pourra élever

  1. Voy. l’art. 141 du Code de procédure.
  2. De l’envoi prescrit par l’art. 7.