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COLONIES FRANÇ., 127-131.

127. Les colonies dont les ressources contributives sont supérieures à leurs dépenses locales peuvent être tenues de fournir un contingent au trésor métropolitain. Les établissements français de l’Inde et de la Cochinchine sont seuls dans ce cas. Et encore, dans cette dernière colonie, le contingent va-t-il être absorbé ou sensiblement réduit par les établissements que nous formons au Tonkin. Dans les autres colonies, lorsqu’il y a un excédant des recettes sur les dépenses, il est versé à la caisse de réserve. Le maximum de ce fonds a été fixé par le décret financier de 1855 (art. 98), de manière à permettre à nos établissements de constituer un fonds de prévoyance en cas d’événements imprévus.

Les colonies dont les ressources locales ne suffisent pas à l’acquittement de leurs dépenses reçoivent une subvention de la métropole.

Le personnel administratif chargé de la trésorerie et de la perception dans les colonies est emprunté aux administrations métropolitaines. Ces fonctionnaires sont nommés par le ministre des finances, sur la demande du ministre de la marine. Il est stipulé en leur faveur une solde d’Europe et une solde coloniale, des passages gratuits pour eux et leur famille.

CHAP. IX. — COMMERCE ET AGRICULTURE.
Sect. 1. — Régime commercial, octroi de mer, douanes.

128. Jusqu’en 1674, le commerce des colonies est resté le monopole exclusif de compagnies auxquelles elles avaient été concédées. La métropole s’étant réservé le droit d’approvisionner les colonies, tout commerce à l’importation et à l’exportation leur était interdit. Cette interdiction fut maintenue après la dissolution de la Compagnie des Indes occidentales. En 1698, un arrêt du conseil permit l’exportation des sucres des Antilles à l’étranger par navires français. Cette faculté ne tarda pas à leur être retirée, et l’introduction des marchandises étrangères ou la sortie des produits coloniaux à destination de l’étranger continuèrent à être frappées des peines de la confiscation et des galères. Le régime du double monopole resta en vigueur jusqu’en 1763, où deux ordonnances ouvrirent le marché des Antilles à certaines denrées alimentaires et à des matériaux de construction, tandis qu’elles permettaient l’exportation directe à l’étranger des sirops et tafias du cru. La révolution de 1789 maintint ce régime commercial, en faisant exception à la règle seulement en faveur du pavillon américain. Toute importation étrangère ne pouvait être autorisée que par des bâtiments français ou par des navires des pays de provenance. En vertu des articles additionnels de la convention conclue, en 1826, entre la France et l’Angleterre, les bâtiments de cette puissance furent traités, dans certains cas déterminés, de la même manière que les bâtiments français. Jusqu’en 1861 les marchés étrangers restèrent fermés aux produits coloniaux, à l’exception des sirops et des tafias, et le marché colonial fut réservé aux produits et au pavillon français.

La loi de 1861 a rompu définitivement et absolument avec le pacte colonial. Depuis cette époque, nos Antilles peuvent importer les produits étrangers et exporter leurs denrées à l’étranger sous tous pavillons. Le principe du libre échange a triomphé de toutes les anciennes réglementations ; mais pour prix de ces franchises, la métropole s’est dégagée de toute obligation commerciale vis-à-vis de ses possessions.

129. Les conseils généraux, faisant usage du droit que leur attribue l’article 2 du sénatus-consulte de 1866, ont voté leur régime douanier. Leurs votes ont été homologués par trois règlements d’administration publique portant les dates des 6 novembre 1867, 4 et 25 avril 1868. Le premier concerne la Martinique, le second la Réunion, et le troisième la Guadeloupe.

À la Martinique, il y a suppression complète des droits de douane sur les marchandises étrangères ;

À la Réunion, l’ancien tarif a été modifié et augmenté dans une certaine mesure, non pas dans un but de protection, mais pour accroître les ressources locales affaiblies par la crise qui pèse sur la colonie ;

À la Guadeloupe, on a supprimé les droits de douane sur les marchandises étrangères autres que le sucre, le tafia, le café, le coton, le cacao, le tabac, le rocou et la vanille.

130. Le régime adopté pour la Réunion n’a donné lieu à aucune critique. Le régime des Antilles a été attaqué. Le commerce métropolitain a objecté que le sénatus-consulte de 1866 permet de modifier les tarifs existants, mais non de les anéantir. Cette interprétation est erronée. Le sénatus-consulte de 1866 a transporté au règlement d’administration publique tous les pouvoirs que le sénatus-consulte de 1854 avait réservés à la loi en matière de douane coloniale (art. 2, § 2). On a ajouté que par cela même que la France paie la dépense de protection et d’administration des colonies, elle doit y proscrire l’admission en franchise des produits étrangers. À cela il est répondu par ce qui se passe dans la métropole, où le sucre étranger est admis aux mêmes conditions que le sucre indigène.

Qu’a voulu le sénatus-consulte de 1866 ? Donner aux colonies une responsabilité qu’elles n’avaient pas à cette époque, les accoutumer à vivre de leur propre vie, à se soutenir par leurs propres forces, et à voir aussi successivement diminuer les subventions inscrites à leur profit au budget de l’État. Ce but ne pouvait être atteint sous l’empire de l’ancienne législation, qui gênait les rapports des colonies avec l’étranger et leur contestait tout pouvoir de décision en matière de finances et de commerce.

131. À l’égard du vote des tarifs de l’octroi de mer, le conseil général a un droit souverain ; mais, d’une part, il ne peut changer l’affectation du produit qui est, aux termes de la constitution des communes, et doit rester exclusivement municipal ; d’autre part, l’octroi ne doit pas servir d’instrument de protection pour les produits coloniaux. C’est une taxe essentiellement fiscale.

En ce qui concerne le mode d’assiette et les règles de prescription, le conseil général n’a qu’un pouvoir de délibération, et lorsqu’il s’agit de frapper de droits d’octroi des objets qui jusqu’alors en étaient affranchis, les délibérations ne sont exécutoires qu’après avoir été approuvées