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ADMINISTRATION, 39-43.

dépenses qui sont couvertes au moyen des impôts votés par la représentation nationale. L’administration recouvre ces impôts, et elle en emploie le produit conformément aux crédits inscrits au budget.

C’est le ministère des finances qui est seul chargé du recouvrement des contributions, soit directes, soit indirectes, ainsi que des autres revenus de l’État. Ce principe est poussé en France presque jusqu’à ses dernières conséquences. Les dépenses sont faites par les divers services publics ; elles sont contrôlées administrativement par le ministère des finances, et, sous une forme judiciaire, par la Cour des comptes.

39. En outre du produit des impôts, la fortune publique se compose encore d’un certain nombre de propriétés ou de domaines, qu’on divise en corporels et incorporels, et qui sont productifs de revenu, d’utilité ou simplement d’agrément.

Il est inutile de dire que les biens ou domaines corporels sont des immeubles et le mobilier qui les garnit ; l’expression de domaine incorporel s’emploie pour désigner certains droits ou péages habituellement affermés, comme la pêche, la chasse dans les bois de l’État, les bacs, etc.

Parmi les propriétés de l’État productives de revenu, nous devons compter avant tout les forêts qui sont administrées en régie, c’est-à-dire directement par les agents de l’État.

Les propriétés productives d’utilité sont ou des bâtiments affectés à des services publics, ou des routes, des ports, des ponts et autres constructions analogues. Leur conservation et leur entretien sont confiés au ministre des travaux publics. La conservation de la plupart des bibliothèques et collections scientifiques est surveillée par le ministre de l’instruction publique.

Les propriétés qu’on pourrait appeler productives d’agrément, sont les promenades et jardins publics, les monuments, etc. Leur entretien est en grande partie dans les attributions du ministère de l’intérieur. (Souvent les promenades appartiennent aux villes.)

Enfin, il est encore des propriétés publiques spécialement affectées à un département, une commune, un établissement hospitalier ou scientifique ; la gestion de cette classe de domaines est contrôlée par le ministre de l’intérieur.

Sect. 5. — Morale publique.

40. « Il n’est certainement, dit De Gerando, pour l’administration publique aucune mission plus sacrée et plus noble à la fois, que celle qui l’appelle à procurer, autant qu’il dépend d’elle, le progrès de la civilisation par l’amélioration des mœurs, l’avancement et la propagation des lumières.

« Elle accomplit cette mission, ou par une action directe, au moyen des institutions qu’elle fonde ou régit elle-même, des services qu’elle organise, ou d’une manière indirecte, soit en favorisant, secondant, protégeant les divers efforts qui tendent au même but, soit en faisant disparaître les obstacles qui s’y opposent. »

On voit par le passage que nous venons de citer, qu’il ne s’agit pas ici de réprimer les attentats à la morale publique, et d’en prévenir le retour en les châtiant ; nous avons parlé ailleurs de cette partie de la tâche de l’administration, en tant qu’elle lui incombe. Nous voulons indiquer une mission encore plus élevée de l’autorité administrative : c’est celle de répandre l’instruction et de protéger les cultes.

41. L’instruction publique se divise en France en trois degrés : l’instruction primaire, secondaire, supérieure.

Chaque commune est tenue d’avoir au moins une école primaire, et, si elle a une certaine importance, elle y ajoute quelquefois une école primaire supérieure. Pour être admis à diriger une école, les instituteurs doivent être porteurs d’un brevet de capacité et d’un certificat de moralité. Ils restent en outre soumis à la surveillance de l’autorité locale et d’inspecteurs spéciaux.

Afin d’assurer le recrutement des instituteurs, l’État a dû leur garantir un minimum de traitement et une pension et les dispenser du service militaire.

Une bonne partie de la nation demande que l’instruction soit obligatoire ; quelques personnes font en outre des vœux en faveur de la gratuité.

L’instruction secondaire est donnée dans les collèges communaux et dans les lycées ; l’instruction supérieure dans les facultés des lettres, des sciences, de médecine, de droit, de théologie.

L’ensemble de ces institutions est compris sous le nom d’Université, dont le chef, ou le Grand-maître, est le ministre de l’instruction publique. Celui-ci exerce son autorité, soit directement, soit au moyen d’un conseil supérieur, de recteurs, commissions départementales, d’inspecteurs de et d’autres agents.

Il existe en outre, en dehors de l’Université, un certain nombre d’écoles spéciales, entretenues par l’État, et des institutions libres, dirigées par des ecclésiastiques ou des laïcs, plus ou moins surveillées par l’administration.

42. Relativement au culte, la tâche de l’administration se borne presque à la protection et à la surveillance. Les bâtiments qui lui sont consacrés appartiennent à l’État, aux départements ou aux communes, et ces bâtiments sont entretenus aux frais de leurs propriétaires. Les dépenses des cultes reconnus sont à la charge de l’État.

Sect. 6. — Richesse publique.[1]

43. Ce n’est pas sans intention que dans notre énumération des divers objets de l’administration nous avons mentionné la richesse publique en dernier lieu. Nous avons voulu indiquer ainsi l’ordre dans lequel ces objets se développent. En effet, la richesse, ou le bien-être, est le résultat d’une civilisation très-avancée, tandis que même un État arriéré a besoin d’une armée, d’une police, de finances, d’une administration. Pour que les gouvernements pensent à favoriser l’accroissement des richesses, il faut que le pays jouisse déjà d’une certaine prospérité. Il se passe bien du temps avant que l’administration se forme sur ce point des principes basés sur l’expérience.

Les principales attributions relatives à la prospérité matérielle de la France sont confiées au

  1. Le mot publique doit être pris ici comme synonyme de ensemble des habitants.