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BOULANGERIE, 18-24.

fices à la caisse municipale. On créa dans ce but un système de compensation des prix extrêmes du pain, qui consistait à maintenir la taxe de cette denrée au-dessous de son prix réel dans les moments de cherté, en tenant compte aux boulangers de cette différence, sauf, en temps de bon marché, à laisser subsister sur le prix du pain une surtaxe payée par les consommateurs aux boulangers et restituée par ceux-ci à la ville.

18. La caisse spéciale désignée sous le nom de caisse de service de la boulangerie fut instituée pour cette double opération, et une organisation spéciale lui fut donnée, en vue d’assurer le contrôle que l’administration devait exercer sur les opérations de la boulangerie pour assurer le service de la compensation.

La caisse établie par les décrets des 27 décembre 1853 et 7 janvier 1854 fonctionnait pour la boulangerie de Paris et du département de la Seine sous la garantie de la ville de Paris et sous l’autorité du préfet de la Seine.

Elle était chargée de payer pour le compte des boulangers et de recouvrer sur eux le montant de leurs achats de blés et farines dont ils devaient faire la déclaration dans un délai de trois jours ; elle leur ouvrait, à cet effet, un crédit sur leurs dépôts de garantie et de réserve et sur toutes les autres valeurs qu’elle acceptait, et à partir de la fin de 1854, les boulangers furent, en outre, astreints à verser, en compte courant, une somme variant de 6,000 à 2,000 fr., suivant l’importance de leur établissement.

La caisse faisait le service de la compensation, c’est-à-dire qu’elle avançait aux boulangers les différences en moins que l’administration laissait subsister entre le prix de vente du pain et son prix réel, puis elle recevait, lorsqu’il y avait lieu, les différences en plus pour se couvrir de ses avances. Un système très-complet de comptabilité et de surveillance était organisé a cet effet.

Enfin, la caisse opérait comme institution de crédit en faisant aux boulangers des avances de fonds producteurs d’intérêt, en recevant de ceux-ci et des meuniers et négociants en grains ou en farines des dépôts en compte courant portant intérêt, et aussi en escomptant le papier de commerce des boulangers.

19. L’administration de la caisse était confiée à un directeur nommé, sur la proposition du préfet de la Seine, par le ministre de l’agriculture et du commerce. Un comité consultatif présidé par le préfet de la Seine et composé du gouverneur de la Banque, du directeur général de la caisse d’amortissement, du directeur du mouvement général des fonds au ministère des finances, et de trois membres du conseil municipal désignés par le ministre sur la proposition du préfet, donnait son avis sur toutes les questions financières relatives au fonctionnement de la caisse.

20. La crise à l’occasion de laquelle le service de la compensation et la caisse de la boulangerie avaient été créés, s’étant prolongée jusqu’en 1856, la caisse dut avancer successivement une somme de plus de 63,000,000 de francs représentant les différences que l’on avait maintenues entre le prix de vente du pain et son prix réel tel qu’il résultait des mercuriales. En ajoutant à ces déboursés les frais de toute nature que la caisse avait eu à supporter depuis sa création, on était arrivé à un total de 69,000,000 de francs, dont 60,000,000 ont été recouvrés ensuite au moyen de surtaxes perçues sur le prix du pain. Le reste a été couvert par le produit des valeurs mises à la disposition de la caisse par le département de la Seine, en vertu d’une loi du 17 juillet 1856, soit à titre de dotation permanente jusqu’à concurrence d’une somme de 20 millions, soit à titre d’avances remboursables et s’élevant aussi à 20 millions.

21. Les moyens financiers dont la caisse a été autorisée à faire usage pour se procurer les fonds nécessaires au service dont elle était chargée, ont consisté, en outre, dans des emprunts autorisés jusqu’à concurrence de 50 millions. Ces emprunts ont été réalisés par l’émission de valeurs de crédit, désignées sous le nom de Bons de la caisse de la boulangerie, à une échéance de 3 à 12 mois et portant un intérêt variable suivant le délai de cette échéance.

22. L’importance des bons en circulation a été considérable dans les premières années d’existence de la caisse, car elle n’avait que ce moyen de faire face aux déboursés qu’entraînait la réduction du prix du pain. Lorsque le département eut constitué à la caisse une dotation et un fonds d’avances, les émissions de bons étaient moins nécessaires, et elles furent réduites à mesure que le découvert diminuait. La caisse conservait, d’ailleurs, entre ses mains, en valeurs disponibles, des fonds suffisants pour le remboursement intégral des bons en circulation.

23. Après avoir recouvré toutes les sommes avancées par elle, la caisse se constitua un excédant d’actif au moyen d’une légère surtaxe qui fut maintenue sur le prix du pain, et cet excédant d’actif était d’environ 2 millions de francs lorsque le régime de la compensation, tel qu’il avait été primitivement établi, cessa de fonctionner au 1er septembre 1863.

En effet, à la date du 31 août 1863, par suite du décret du 22 juin précédent qui avait rendu la boulangerie libre et qui ne permettait plus l’application des mesures prises en 1853, un autre décret était venu modifier complétement le régime de la caisse de la boulangerie et le système suivi jusqu’alors pour la compensation des prix extrêmes du pain.

Par ce décret il était établi, à l’entrée de Paris, un droit spécial de 1 fr. par 100 kil. sur le blé et le pain, et de 1 fr. 30 c. par quintal sur la farine. Ce droit, perçu par l’administration de l’octroi était versé à la caisse de la boulangerie qui effectuait le placement des sommes en provenant et qui devait, lorsque le prix du pain de 1re qualité dépasserait le prix de 50 centimes le kilogramme, supporter l’excédant au moyen des fonds ainsi mis en réserve.

24. La perception de ce droit s’est effectuée régulièrement pendant les années suivantes jusqu’en 1870, et la caisse n’a eu de différences à payer sur le prix du pain qu’à la fin de 1867 et au commencement de 1868, époque où, à la suite d’une mauvaise récolte, le prix de revient du pain a dépassé 50 centimes. Le paiement de ces différences a occasionné une dépense de 3,300,000 fr. environ.