Page:Block - Dictionnaire de l’administration française, tome 1.djvu/18

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Gouvernement, portant création d’abattoirs et antérieurs à l’ordonnance de 1838, ont prescrit la fermeture des tueries particulières existant dans la commune où l’abattoir était établi. L’ordonnance du 15 avril 1838 n’a donc fait autre chose qu’énoncer d’une manière générale un principe qui était passé depuis longtemps dans la pratique.

4. La suppression des tueries particulières n’implique pas nécessairement, pour les bouchers, l’obligation de se servir de l’abattoir. Ils peuvent, en se conformant aux règlements, établir des tueries en dehors de la ville où l’abattoir est créé, ou abattre leurs bestiaux dans une commune voisine. Tel est, du moins, le système qui a prévalu depuis 1832, et dans lequel on s’est plus préoccupé du principe de la liberté industrielle que de l’intérêt financier des communes. Dans la période antérieure, au contraire, les actes d autorisation imposent en général aux bouchers l’obligation de faire abattre exclusivement dans l’abattoir de la commune tous les animaux de boucherie destinés à la consommation locale. Lorsqu’on veut apprécier le régime d’un abattoir, il importe donc de se reporter au texte même de l’acte qui l’a institué ; mais, dans l’un et l’autre système, les intérêts de la salubrité et de la sécurité publiques peuvent être également sauvegardés.

Les bouchers qui ne sont pas tenus de se servir de l’abattoir ne peuvent pas être imposés d’une taxe d’entretien, quel que soit le nom donné à cette taxe.

5. À l’égard des fonderies de suifs et des triperies annexées aux abattoirs, on n’a pas toujours suivi non plus les mêmes errements. Pendant plusieurs années, on trouve dans les ordonnances de création une disposition portant maintien des anciennes fonderies et triperies, et défense de délivrer des permissions pour en établir de nouvelles ; mais, depuis longtemps, on ne prescrit plus rien à ce sujet, et chacun reste libre de créer des fonderies et des triperies en concurrence avec celles de l’abattoir, en se conformant aux décrets et ordonnances sur les ateliers insalubres. La clause qui, dans certaines villes, interdisait d’autoriser de nouvelles fonderies et triperies, paraît d’ailleurs être généralement tombée en désuétude.

6. À Paris, les bouchers sont tenus de se servir des abattoirs non-seulement pour l’abatage de leurs bestiaux, mais encore pour la fonte des suifs et la préparation des issues provenant des animaux qu’ils font abattre. Il existe, d’ailleurs, des abattoirs spéciaux pour les porcs.

7. Le décret du 25 mars 1852 sur la décentralisation administrative ayant rangé l’autorisation des établissements insalubres de première classe parmi les objets sur lesquels les préfets pouvaient désormais statuer sans recourir à l’autorité supérieure, on en tira d’abord cette conséquence qu’en tant qu’établissements dangereux et insalubres, les abattoirs étaient décentralisés, et qu’à l’égard des voies et moyens d’exécution, les préfets pouvaient également approuver les tarifs d’abatage, les acquisitions, aliénations et échanges de terrains, et donner, dans les limites nouvelles déterminées par le décret du 25 mars, les autorisations nécessaires pour les emprunts et impositions extraordinaires ; mais la question ayant été examinée par les sections réunies de l’intérieur, de l’instruction publique et des cultes, des travaux publics, de l’agriculture et du commerce, du Conseil d’État, cette interprétation a été abandonnée, et, conformément à l’avis des deux sections du Conseil, les préfets avaient été invités à s’abstenir dorénavant de statuer sur les questions d’abattoirs. (Circ. int. 22 juin 1853).

8. Une des principales considérations qui avaient motivé cette décision était tirée de la tendance des villes à exagérer les taxes d’abatage et de la crainte que les préfectures ne résistassent pas assez énergiquement à cette tendance. Depuis lors, pour éviter l’abus et pour faire profiter en même temps les créations d’abattoirs du bénéfice de la décentralisation, on a imaginé un moyen terme consistant à donner aux préfets le droit de statuer sur ces sortes d’affaires, mais à fixer en même temps les limites que ne pourraient excéder les tarifs des abattoirs dans les cas les plus ordinaires, et à réserver l’approbation de ces tarifs à l’autorité supérieure, lorsque, par suite de circonstances exceptionnelles, il y aurait lieu d’admettre des taxes plus élevées. Tel a été l’objet du décret du 1er août 1864.

9. Ce décret, qui confère aux préfets le droit d’autoriser l’établissement des abattoirs, pose en principe que les taxes d’abatage seront calculées de manière à ne pas dépasser les sommes nécessaires pour couvrir les frais annuels d’entretien et de gestion des abattoirs, et pour tenir compte à la commune de l’intérêt du capital dépensé pour leur construction et de la somme qui serait affectée à l’amortissement de ce capital.

10. Aux termes du même décret, ces taxes ne peuvent dépasser le maximum d’un centime cinq millimes par kilogramme de viande de toute espèce. Toutefois, lorsque les communes sont forcées de recourir à un emprunt ou à une concession temporaire pour couvrir les frais de construction des abattoirs, les taxes peuvent être portées à deux centimes par kilogramme de viande nette, si ce taux est nécessaire pour pourvoir à l’amortissement de l’emprunt ou indemniser le concessionnaire de ses dépenses.

11. Lorsque l’amortissement du capital est opéré, ou à l’expiration de la concession, les taxes doivent être ramenées au taux nécessaire pour couvrir seulement les frais d’entretien et de gestion.

12. Dans le cas où des circonstances exceptionnelles nécessitent des taxes supérieures à celles qui ont été indiquées ci-dessus, elles ne peuvent être autorisées que par un décret rendu en Conseil d’État.

13. La création des abattoirs est donc aujourd’hui replacée sous le régime déterminé par l’article 3 de l’ordonnance royale du 15 avril 1838, lequel est ainsi conçu : « Quand il y a lieu à autoriser une commune à établir un abattoir public, toutes les mesures relatives tant à l’approbation de l’emplacement qu’aux voies et moyens d’exécution, devront nous être soumises simultanément par nos ministres de l’intérieur et des travaux publics, de l’agriculture et du commerce, pour en être ordonné par un seul et même acte d’administration publique. »