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ARMES, 27-37.

rigueur, éminemment transitoires et de circonstance, que les divers pouvoirs qui se sont succédé depuis 1789 ont prises dans les moments de guerre civile ou de guerre étrangère.

Nous rappellerons seulement qu’un décret de 1793 avait défendu, sous peine de dix ans de fers et de confiscation des armes, à tout fabricant, fourbisseur ou marchand d’armes, d’en vendre, délivrer ou envoyer, sans en avoir préalablement fait la déclaration à la municipalité du lieu de sa résidence.

Un décret de l’année précédente avait déclaré infâme, traître à la patrie et digne de la peine de mort, les personnes qui refuseraient de remettre leurs armes.

27. La loi du 24 mai 1834 défend, en ces termes, les dépôts d’armes de commerce : « Art. 3. Tout individu qui, sans y être légalement autorisé, sera détenteur… d’un dépôt d’armes quelconque, sera puni d’un emprisonnement d’un mois à 2 ans et d’une amende de 16 fr. à 1,000 fr. »

28. Les armes de commerce peuvent être exportées sans autorisation spéciale ; mais il faut qu’elles soient accompagnées de certificats constatant qu’il ne s’agit pas d’armes de guerre. Ces certificats sont délivrés par les commandants d’artillerie des villes de Paris, Toulon, Marseille, Bayonne, Bordeaux, La Rochelle, Nantes, Brest, Le Havre, Lille, Bourges, Besançon et Perpignan.

Sect. 2. — Armes de traite.

29. Les armes dites de traite, c’est-à-dire destinées au commerce de la troque avec certaines contrées d’Afrique, sont considérées comme armes de commerce ; elles peuvent néanmoins avoir le calibre de guerre et sortir des ateliers et arsenaux de l’État.

D’après une lettre du ministre de la guerre, du 31 mai 1832, elles se distinguent des armes de guerre en ce qu’elles sont d’une fabrication très-inférieure.

30. Il doit être donné connaissance des dépôts d’armes dites de traite, et qui sont du calibre de guerre français, par des propriétaires, aux commissaires de police des villes où sont situés ces dépôts.

Un registre tenu par ces commissaires indique l’entrée, la sortie et la destination de ces armes. Les maires et sous-préfets sont informés de ces mouvements.

31. En 1853, le Gouvernement, afin d’étendre et de faciliter le commerce de la troque, a mis à la disposition de nos armateurs les fusils à silex rentrés en magasin après avoir été remplacés dans l’armée par les fusils à percussion.

L’armateur, en demandant au ministre de la guerre l’autorisation de prendre livraison des armes qu’il aura choisies et de les exporter, doit désigner le port de sortie et le lieu de destination.

CHAP. III. — ARMES SECRÈTES OU PROHIBÉES.

32. Une déclaration du roi du 23 mars 1728, dont l’exécution a été de nouveau prescrite par décret du 12 mars 1816, contient les dispositions suivantes :

« Ordonnons qu’à l’avenir toute fabrique, commerce, vente, débit, achat, port et usage des poignards, couteaux en forme de poignards, soit de poche, soit de fusil, des baïonnettes, pistolets de poche, épées en bâtons, bâtons en ferrements, autres que ceux qui sont ferrés par le bout, et autres armes offensives, cachées ou secrètes, soient et demeurent pour toujours généralement abolis et défendus, enjoignant à tous couteliers, fourbisseurs, armuriers et marchands de les rompre et briser incessamment après l’enregistrement des présentes. »

Le décret du 2 nivôse an XIV (23 décembre 1805) a ajouté à cette nomenclature les fusils et pistolets à vent, et l’art. 314 du Code pénal a prohibé les stylets et tromblons.

33. Le décret du 14 décembre 1810, en rangeant les pistolets de poche au nombre des armes assujetties à des épreuves avant la mise en vente, avait rendu douteux le maintien de la disposition de 1728 relative auxdits pistolets de poche : une ordonnance du 25 février 1837 a fait cesser toute incertitude à cet égard en rétablissant la prohibition dont ils avaient été l’objet.

34. La Cour de cassation, dans un arrêt du 6 août 1824, a expliqué les motifs qui ont déterminé le législateur à proscrire les armes secrètes : « Il faut distinguer, dit la Cour suprême, entre les armes apparentes et défensives, qui ne deviennent offensives que par accident, et les armes cachées, secrètes, offensives par la présomption légale, et dont le port illicite favoriserait les attentats des malfaiteurs, au grand détriment de la chose publique, de la sûreté des propriétés et des personnes des citoyens paisibles[1]. »

35. Est punie d’un emprisonnement d’un mois à un an et d’une amende de 16 fr. à 500 fr. la fabrication, le débit ou la distribution des armes prohibées par la loi ou par des règlements d’administration publique.

CHAP. IV. — PORT D’ARMES.

36. Les Français des premiers temps de la monarchie ne se montraient jamais sans leurs armes. À partir du ixe siècle, tous les souverains s’appliquèrent à détruire cette coutume que les Germains et les Francs avaient introduite dans les Gaules. Charlemagne fit défense de porter des armes offensives et défensives, et d’en expédier hors de l’empire.

Une ordonnance du 25 novembre 1487 interdit à tous, de quelque état et condition qu’ils soient, le port d’armes, arbalètes, hallebardes, piques, vougues, épées, dagues et autres bâtons invasifs, sous peine de prison et de forfaiture desdits bâtons, et d’être grièvement puni. Il y a exception en faveur des officiers, gens nobles du roi, et de ceux qui portent les armes pour la défense du pays.

Une autre exception fut admise pour les voyageurs, autorisés à se munir d’armes pour leur sûreté.

37. Après l’invention de la poudre, quand l’usage des armes à feu, en se répandant, rendit plus grands les dangers résultant du port d’armes, il fallut recourir à des mesures spéciales et plus sévères. François Ier défendit, en 1546, à toutes personnes, même aux gentilshommes, de porter des armes à feu, sous peine d’être saisis au corps et pendus sur place, sans procès. Il enjoignit en même temps à tout détenteur d’armes de les déposer aux hôtels et châteaux des villes.

  1. Nous nous permettront une observation : il nous semble que celui qui se propose de commettre un crime, se munira d’une arme prohibée, malgré la loi ; le bon citoyen seul obéit à la loi, or la loi le désarme vis-à-vis du malfaiteur. Il est vrai qu’on peut obtenir une permission de porter des armes cachées, en s’adressant au commissaire de police, mais il faudra justifier d’un besoin spécial. M. B.