Page:Block - Dictionnaire de l’administration française, tome 1.djvu/103

Cette page a été validée par deux contributeurs.
87
ALIÉNÉ, 34-39.

réglementaire, l’établissement le complète. Lorsqu’il dépasse le taux réglementaire, l’excédant du pécule peut être employé au profit de l’aliéné ou remis à un des membres de sa famille. En cas de décès, le pécule de l’aliéné travailleur appartient à l’asile.

Il est inutile d’ajouter que le médecin est toujours consulté sur la question de savoir si l’aliéné doit ou non travailler et sur la durée du travail qui lui peut être imposé. Avant tout, en effet, dans les asiles, le travail doit être considéré au point de vue curatif. (Circ. min. 20 mars 1857.)

34. Les asiles publics ne sont point seulement destinés aux aliénés dangereux, séquestrés dans un intérêt public et aux aliénés indigents. Ils peuvent aussi recevoir des aliénés riches ou dans l’aisance, qui sont alors assujettis au paiement d’une pension proportionnée à la nature du traitement qu’ils reçoivent et du genre de vie qui leur est procuré. (L. 1838.) Cette admission de pensionnaires, en donnant un certain bénéfice aux établissements, allége le fardeau que fait peser sur les finances publiques l’entretien des aliénés indigents et contribue à la prospérité et au développement des asiles.

35. Tout ce que nous avons dit sur l’organisation de l’administration des asiles publics ne s’applique pas à la maison nationale de Charenton (voy. ce mot), qui est au nombre des établissements généraux de bienfaisance, et qui est régie par les ordonnances et décrets particuliers à ces institutions.

art. 2. — établissements privés.

36. Il existait, au moment où a été rendue la loi du 30 juin 1838, deux classes d’établissements privés. Les uns, fondés par des associations religieuses, recevaient les aliénés pauvres moyennant une faible rétribution, qui souvent ne dépassait pas 60 centimes par jour, mais qui, grossie par les secours de la charité publique, complétée surtout par le dévouement et par le zèle désintéressé des religieux, suffisait à toutes les nécessités de l’entretien et du traitement des malades.

Les autres, créés par l’intérêt privé, étaient plus particulièrement destinés aux familles opulentes ou aisées ; plusieurs d’entre eux, les rapporteurs des deux Chambres le reconnurent, ne laissaient rien à désirer et avaient acquis une juste célébrité, due au mérite éminent de leurs fondateurs et directeurs.

37. Le législateur se garda de repousser l’utile concours que la charité religieuse et l’intérêt privé, ennobli par la science, venaient prêter à l’autorité publique. Mais il assujettit à la surveillance spéciale du Gouvernement (L., art. 3) des établissements qui, selon les expressions de l’exposé des motifs de la loi de 1838, « peuvent si aisément devenir une prison. »

38. Toutes les personnes qui ont le droit et le devoir de visiter les établissements publics, exercent la même inspection sur les établissements privés ; et, de plus, la visite obligée du procureur de la République, qui, dans les établissements publics, n’a lieu qu’une fois par semestre, doit se renouveler au moins tous les trimestres dans les asiles privés. (L., art. 4.)

39. Aucun établissement privé, consacré au traitement d’autres maladies, ne peut recevoir d’aliénés sans autorisation spéciale et s’il n’affecte à ces derniers un local entièrement séparé (L., art. 5).

40. Nul ne peut ni former, ni diriger un asile d’aliénés sans l’autorisation du préfet. (L., art. 5 ; D. 25 mars 1852, tableau A, no 32.) Il convient de remarquer qu’à la différence de ce qui a lieu pour les ateliers dangereux ou incommodes, l’autorisation n’est pas ici donnée à l’établissement, mais à l’homme. Ainsi, un établissement ne pourrait, sous prétexte que la création en a été primitivement autorisée, être librement transmis d’un directeur à un autre, sans le contrôle et l’agrément du préfet.

41. Le titre II de l’ordonnance réglementaire du 18 décembre 1839, rendue en vertu d’une délégation faite par l’art. 6 de la loi, détermine les conditions auxquelles sont concédées les autorisations, les cas où elles sont retirées et les obligations qu’elles entraînent. Il a été l’objet d’une circulaire explicative du ministre de l’intérieur qui porte la date du 20 avril 1855.

42. Conditions des autorisations. I. Les unes se rapportent à l’aptitude personnelle du candidat. Il doit être majeur et exercer ses droits civils. (O. régl., art. 18.)

Ainsi, la dégradation civique, l’interdiction de l’exercice de certains droits civils, prononcée en exécution de l’art. 42 du Code pénal, l’interdiction prononcée en vertu des art. 489 et suivants du Code civil ou la soumission à l’autorité d’un conseil judiciaire, constituent des incapacités radicales.

43. Le candidat doit être de bonne vie et mœurs, et produire comme justification un certificat du maire de la commune ou de chacune des communes où il a résidé depuis trois ans. (O. régl., art. 18, 2o.)

44. La qualité de docteur en médecine est exigée en principe. (O. régl., art. 18, 3o.) Toutefois, elle peut être suppléée par la production de l’engagement d’un médecin, agréé par le préfet, et toujours révocable, qui déclare se charger, sous sa responsabilité, du service médical de la maison. (O. régl., art. 19.)

45. II. Après ces conditions d’aptitude personnelle, l’ordonnance exige (art. 20, 21, 22, 23) que le requérant justifie, par l’indication du nombre et du sexe des aliénés auxquels l’asile sera ouvert, par la production du plan et du règlement intérieur de la maison, que les aliénés trouveront dans l’établissement un espace suffisant, un air et des eaux salubres, un voisinage tranquille, le nombre voulu de subdivisions, une surveillance constante, une discipline exacte, toutes les conditions physiques et morales les plus propres à garantir la guérison.

46. III. L’ordonnance réglementaire prévoyant le cas où, par suite de mauvaises affaires, de retrait d’autorisation motivé par sa gestion défectueuse ou par toute autre cause, le directeur de l’asile privé se verrait dans l’impossibilité de continuer à l’administrer, a voulu que le sort des malheureux pensionnaires fût néanmoins assuré. À cet effet, les articles 24 et 25 disposent que tout directeur devra, avant d’entrer en fonctions, fournir un cautionnement dont le montant est dé-