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Paris pour une mission importante dont les autorités universitaires allemandes l’avaient chargé, il avait beaucoup regretté l’absence de Jules et il aurait été très fâché de repartir sans l’avoir vu. Mais, hier soir, sa mère Helena lui avait appris que le peintre était de retour, et il s’était empressé d’accourir à l’atelier. Il devait quitter Paris le soir même : car les circonstances étaient graves.

— Tu crois donc à la guerre ? lui demanda Jules.

— Oui. La guerre sera déclarée demain ou après-demain. Elle est inévitable. C’est une crise nécessaire pour le salut de l’humanité.

Jules et Argensola, ébahis, regardèrent celui qui venait d’énoncer gravement cette belliqueuse et paradoxale proposition, et ils comprirent aussitôt qu’Hartrott était venu tout exprès pour leur parler de ce sujet.

— Toi, continua Hartrott, tu n’es pas Français, puisque tu es né en Argentine. On peut donc te dire la vérité tout entière.

— Mais toi, répliqua Jules en riant, où donc es-tu né ?

Hartrott eut un geste instinctif de protestation, comme si son cousin lui avait adressé une injure, et il repartit d’un ton sec :

— Moi, je suis Allemand. En quelque endroit que naisse un Allemand, il est toujours fils de l’Allemagne. Puis, se tournant vers Argensola :

— Vous aussi, monsieur, vous êtes un étranger.