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de pesos : car le maître bourru ne laissait pas d’être généreux pour ceux de ses serviteurs qu’il avait pris en amitié. À la fin, un dernier legs, le plus gros, attribuait en propre à Jules Desnoyers une vaste estancia, avec cette mention spéciale : le grand-père faisait don de ce domaine à son petit-fils pour que celui-ci pût en appliquer le revenu à ses dépenses personnelles, dans le cas où sa famille ne lui fournirait pas assez d’argent de poche pour vivre comme il convenait à un jeune homme de sa condition.

— Mais l’estancia vaut des centaines de mille pesos ! protesta Karl, devenu plus exigeant depuis qu’il était sûr que sa femme n’avait pas été oubliée.

Marcel, bienveillant et ami de la paix, avait son plan. Expert à l’administration de ces biens énormes, il n’ignorait pas qu’un partage entre héritiers doublerait les frais sans augmenter les profits. En outre, il calculait les complications et les débours qu’amènerait la liquidation d’une succession qui se composait de neuf estancias considérables, de plusieurs centaines de mille têtes de bétail, de gros dépôts placés dans des banques, de maisons sises à la ville et de créances à recouvrer. Ne valait-il pas mieux laisser les choses en l’état et continuer l’exploitation comme auparavant, sans procéder à un partage ? Mais, lorsque l’Allemand entendit cette proposition, il se redressa avec orgueil.

— Non, non ! À chacun sa part. Quant à moi, j’ai