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abord, et sept ou huit mois se passèrent avant que Madariaga consentît à entendre raison. Mais, un matin, Marcel dit au vieillard :

— Helena vient d’accoucher. Elle a un garçon qu’ils ont nommé Julio, comme vous.

— Et toi, grand propre à rien, brailla Madariaga, peut-être pour cacher un attendrissement involontaire, est-ce que tu m’as donné un petit-fils ? Paresseux comme un Français ! Ce bandit a déjà un enfant, et toi, après quatre ans de mariage, tu n’as rien su faire encore ! Ah ! les Allemands n’auront pas de peine à venir à bout de vous !

Sur ces entrefaites, la pauvre Misià Petrona mourut. Héléna, avertie par Marcel, se présenta au domaine pour voir une dernière fois sa mère dans le cercueil ; et Marcel, profitant de l’occasion, réussit enfin à vaincre l’obstination du vieux. Après une longue résistance, Madariaga se laissa fléchir.

— Eh bien, je leur pardonne. Je le fais pour la pauvre défunte et pour toi. Qu’Héléna reste à la maison, et que son vilain Allemand la rejoigne.

D’ailleurs le vieux fut intraitable sur la question des arrangements domestiques. Il se refusa absolument à considérer Hartrott comme un membre de la famille : celui-ci ne serait qu’un employé placé sous les ordres de Marcel, et il logerait avec ses enfants dans un des bâtiments de l’administration, comme un étranger. Karl accepta tout cela et beaucoup